La classe politique et le milieu des affaires réagissent depuis ce matin à l'annonce du décès de Paul Desmarais, un homme d'affaires dont la carrière et l'héritage qu'il lègue à la société dans laquelle il a oeuvré sont vantés par plusieurs.

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Le Conseil du patronat du Québec a salué la contribution «inestimable de Paul Desmarais à la prospérité du Québec et du Canada». «Si son départ constitue certainement une immense perte pour le milieu des affaires et pour l'ensemble de la société québécoise et canadienne, sa contribution et son exemple resteront des modèles pour les futures générations d'entrepreneurs qui lui succéderont», a dit son président, Yves-Thomas Dorval.

La communauté d'affaires a aussi tenu à rendre hommage à l'influent homme d'affaires. «M. Desmarais a sans nul doute été le plus grand entrepreneur francophone de l'histoire canadienne. Il a démontré qu'il est possible pour les francophones de réussir en affaires de brillante façon. Il va ainsi rester une source d'inspiration importante pour les prochaines générations d'entrepreneurs», a dit le président et chef de la direction de la Banque Nationale du Canada, Louis Vachon.

Paul Desmarais, qui a participé à sa façon à la fondation du Québec Inc., suscitait l'admiration chez ses pairs.

Le président de Québecor Média, qui est notamment propriétaire du Journal de Montréal et de TVA, a salué le grand philanthrope qu'était M. Desmarais. 

«Je tiens à saluer la mémoire de cet homme de caractère, qui, grâce à sa détermination, a créé l'une des peu nombreuses multinationales canadiennes. Monsieur Desmarais a par ailleurs été un grand philanthrope qui a contribué généreusement à d'importantes institutions québécoises. Au nom de la direction et de tous les employés de Québecor, je tiens à offrir à la famille Desmarais mes plus sincères condoléances », a déclaré M. Péladeau.

Le président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec, Michael Sabia, a décrit un homme généreux. 

«Paul Desmarais était un grand homme, un grand bâtisseur, aussi bien ici au Québec, qu'au Canada ou ailleurs dans le monde. Plus que cela, c'était un homme profondément engagé et généreux, qui croyait fermement qu'être un leader du monde des affaires venait aussi avec une responsabilité importante, celle de contribuer à sa communauté, à son pays, de le bâtir, de le rendre meilleur», a-t-il dit. 

Jean Coutu, président du conseil d'administration du groupe de pharmacies, a qualifié Paul Desmarais de modèle.

«Paul Desmarais a été une des figures marquantes du monde des affaires québécois et canadien. Il a été pour moi, comme pour plusieurs personnes, un modèle à suivre. J'ai eu le plaisir de le rencontrer à quelques reprises et chaque fois, les entretiens que nous avions m'éclairaient sur des situations complexes ou délicates. Je salue ce grand homme dont l'intelligence et le sens des affaires ont permis de créer un empire qui s'étend bien au-delà de nos frontières», a-t-il déclaré.

Laurent Beaudoin, président du conseil d'administration de Bombardier, connaissait M. Desmarais depuis la fin des années soixante.

«Lorsqu'on regarde d'où il est parti et ce qu'il a fait avec Power Corp., c'est un exemple qui montre ce qu'on peut faire quand on a de l'ambition, qu'on a du jugement et qu'on n'a pas peur du travail.

«Il a réussi à faire rayonner le Québec à travers sa compagnie un peu partout dans le monde. Qu'on soit en Europe, en Chine ou dans d'autres pays, Power est bien connu, mais surtout lui, personnellement, est bien connu», a déclaré M. Beaudoin.

Le président et chef de direction d'Alimentation Couche-Tard, Alain Bouchard, considérait Paul Desmarais comme une «référence incontournable».

«Je me remémore une série de la CBC à l'époque qui couvrait l'establishment canadien, dont Paul Desmarais. J'ai tout lu ce qui s'écrivait sur lui, même s'il a toujours été très discret il accordait très peu d'entrevues.

«Avec le décès de Paul Desmarais, le Canada et le Québec perdent un grand entrepreneur qui a choisi de s'établir au Québec avec sa famille et ce, malgré l'adversité parfois et la frilosité des Québécois devant la réussite et la richesse en général.»

Guy Savard, qui a été président-directeur-général de la Caisse de dépôt et placement du Québec de Merrill Lynch pour le Québec, croit que le Canada a perdu un ambassadeur.

«Le Canada tout entier a perdu un grand ambassadeur et un homme d'affaire remarquable. C'est une très lourde perte pour sa famille et pour ses nombreux amis. Monsieur Desmarais Sr a su cultiver des relations de premiers plans avec les grands de ce monde et bâtir des amitiés solides sur le plan national et international.  À son mérite, il a su avant tout transmettre à ses successeurs tous ses attributs laissant derrière lui un héritage exceptionnel», a dit M. Savard.

 Lino Saputo père, président du conseil d'administration de l'entreprise Saputo, admirait l'homme d'affaires.

«Paul Desmarais était un homme que j'admirais, un entrepreneur avec une grande détermination. Il a fait de Power Corporation une entreprise respectée et admirée ici et dans le monde entier. Le Canada perd un grand homme», a-t-il déclaré.

Raymond Royer, membre du conseil d'administration de la Corporation Financière Power et ancien président-directeur général de Domtar, croit que M. Desmarais est l'homme canadien qui a connu le plus grand succès dans le monde des finances.

«C'est un grand Canadien qui a toujours eu à coeur les intérêts du Canada. C'est le Canadien français qui a le mieux réussi dans le secteur de la finance, qui était davantage réservé aux anglophones à l'époque. C'est un grand visionnaire et un grand mécène. Nous perdons quelqu'un de très bien», a-t-il dit. 

Réactions sur les collines parlementaires

À la suite de l'annonce du décès de Paul Desmarais, plusieurs personnalités du monde politique ont tenu à rendre hommage à ce «grand bâtisseur».

L'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une motion rendant hommage à l'homme d'affaires. «Le Québec perd l'un de ses plus grands bâtisseurs» avec la mort de Paul Desmarais, a déclaré la première ministre Pauline Marois.

La classe politique fédérale a aussi eu de bons mots pour l'homme d'affaires.

En Asie pour le Sommet de la coopération Asie-Pacifique (APEC), le premier ministre du Canada, Stephen Harper, a vanté par voie de communiqué le leadership et l'intégrité de l'homme d'affaires.

«M. Desmarais, un des hommes d'affaires du Canada qui a le mieux réussi, était connu pour son leadership, son intégrité, sa vision d'envergure internationale et son profond attachement à son pays. Il participait aussi activement au milieu des services communautaires, ainsi qu'à ceux de l'éducation et des arts.

«On se souviendra de M. Desmarais comme d'un chef d'entreprise unique, qui a amélioré la vie des Canadiens, par les emplois qu'il a créés et par son travail caritatif», a-t-il dit.

L'ancien chef libéral et premier ministre Jean Chrétien estime pour sa part que Paul Desmarais était un «bâtisseur» qui a su inspirer d'autres francophones à se lancer en affaires, un milieu qui a longtemps été dominé par les anglophones.

Ébranlé par la perte d'un ami, M. Chrétien a soutenu que M. Desmarais laisse un héritage de «confiance» en l'avenir.

«C'était un homme extraordinaire, un francophone de Sudbury qui est devenu probablement l'homme d'affaires francophone le plus éminent qu'on ait connu dans l'histoire du Canada. Je le connaissais depuis très longtemps. Évidemment, nos familles sont réunies. Nous partageons quatre petits-enfants», a affirmé l'ancien premier ministre, joint par La Presse en Italie.

«C'était un homme très gentil, un très bon homme d'affaires et très cultivé aussi. Il était très fier de ses origines françaises. Il était aussi très généreux au Canada, au Québec et même en France. Il a fait des contributions importantes. Ce n'était pas toujours connu, mais cela lui faisait toujours plaisir de le faire. C'était un sacré bon homme, comme on dit», a-t-il ajouté.

M. Chrétien a ajouté que le parcours de M. Desmarais représente «une histoire fantastique». «C'est une grosse perte. Il a fait une contribution colossale au Québec et au Canada. C'était un Canadien dans l'âme.»

La fille de M. Chrétien, France, est l'épouse d'André Desmarais, le fils de M. Paul Desmarais.

De son côté, Bob Rae, ancien premier ministre néo-démocrate de l'Ontario et ex-chef intérimaire du Parti libéral du Canada, a vanté les mérites économiques, politiques et personnels de l'homme d'affaires qu'il connaissait depuis une quarantaine d'années.

«Je pense surtout à l'homme, a-t-il dit. Pour beaucoup de monde, c'était un représentant d'une certaine classe. Mais pour moi, c'était un homme qui aimait la vie, qui était très généreux avec son amitié et ses conseils et c'est avant tout le souvenir que j'aurai.»

Au niveau financier, «il a insisté sur l'ouverture du Québec et du Canada sur les marchés du monde, a ajouté M. Rae. Et je crois que ça a affecté beaucoup de monde dans leur pensée». Le frère de Bob Rae, John, travaille chez Power Corporation depuis plusieurs années.

Le chef du Parti libéral du Canada Justin Trudeau a réagi par Twitter: «Triste d'apprendre le décès de Paul Desmarais - un bon ami de mon père, un entrepreneur canadien exceptionnel et un généreux philanthrope», a-t-il déclaré.

Le chef du Nouveau parti démocratique Thomas Mulcair a aussi offert ses condoléances à la famille de M. Desmarais via son fil Twitter. «Le Canada perd aujourd'hui un grand homme», a écrit M. Mulcair.

Le Bloc québécois a indiqué pour sa part que la contribution de M. Desmarais allait au-delà de son apport économique. «Dans un Québec dont les divisions socio-économiques s'entendaient à la langue parlée, il a démontré que les plus hauts sommets étaient aussi à la portée d'un francophone», a indiqué son chef, Daniel Paillé.

«Ça vaut 15 délégués à l'étranger»

Le sénateur Jean-Claude Rivest, qui était un proche conseiller de Robert Bourassa, se souvient que l'ex-premier ministre du Québec avait des conversations téléphoniques fréquentes avec M. Desmarais lorsqu'il était au pouvoir.

«Une fois, je lui avais dit : «Pourquoi tu parles à Paul Desmarais? Il est toujours en désaccord avec toi!» Il m'avait répondu: «Paul Desmarais, ça vaut 15 délégués du Québec à l'étranger.»

«Le Québec opère bien sûr auprès des grands banquiers sur le plan de ses investissements, de ses emprunts, du financement de ses grands projets, a expliqué le sénateur. Paul Desmarais était très familier avec eux et il n'a jamais hésité à aider le Québec et le gouvernement du Québec.»

Les candidats à la mairie de Montréal ont tenu à rendre hommage au grand homme d'affaires. «Paul Desmarais est un grand pionnier du monde des affaires et un grand Montréalais. Il a beaucoup fait pour le Canada, pour son rayonnement international. Pour plusieurs entrepreneurs, c'est un exemple qu'on peut aller loin quand on a une vision et une passion», a dit Denis Coderre.

«C'est un grand Montréalais et un grand homme d'affaires. Il savait quand acheter mais aussi quand vendre une entreprise. Chez Power Corporation du Canada, il a instauré une structure exceptionnelle de gestion et de gouvernance. Il fut aussi de loin le plus grand philanthrope à Montréal. Il était très discret, mais il a donné plus d'argent que quiconque», a déclaré Marcel Côté.

L'ancien premier ministre du Québec, Jean Charest, a quant à lui décrit M. Desmarais comme un «réel ambassadeur du Québec et du Canada». «Son histoire et son cheminement font de lui un leader de son siècle et de sa génération», a dit par voie de communiqué, M. Charest, aujourd'hui associé au cabinet McCarthy Tétrault. M. Charest a tenu à rendre hommage à M. Desmarais bien qu'il soit en déplacement vers Hong Kong pour un voyage d'affaires.

Le ministre de l'Enseignement supérieur, Pierre Duchesne, a salué la mémoire de cet «homme d'influence important au Québec, au Canada et dans le reste du monde». «Il avait une finesse d'esprit dans la façon de faire des choix économiques importants. Il a été longtemps dans les pâtes et papiers. Il a vu venir les cycles défavorables, il s'est retiré, il est allé dans d'autres domaines énergétiques. Il a vu le marché chinois avant bien d'autres.» Le ministre Duchesne a aussi rappelé le mécénat de M. Desmarais dans le domaine des arts. «Il en a fait profiter tout le Québec, a-t-il souligné. Son siège social est toujours demeuré à Montréal. Il a toujours cru au Québec. Il y a eu toutes sortes de débats économiques et politiques, mais il a toujours cru au Québec.»

Pour Claude Lamoureux, administrateur de société et ancien président de Teachers (régime de retraite des enseignants ontariens), Paul Desmarais était un homme qui avait du flair.

«Je ne l'ai pas connu personnellement, mais j'ai suivi sa carrière. C'est quelqu'un qui avait du flair, qui a créé une entreprise à l'échelle mondiale à partir de pas grand chose. Si on regarde ce qu'il a fait, c'est pas mal fantastique.

C'est quelqu'un qui peut servir de modèle. Il a travaillé très fort, il a été capable de créer des liens à l'intérieur et à l'extérieur du Canada. On aurait besoin de plusieurs Paul Desmarais», a-t-il dit.

Gérard Mestrallet, président-directeur général de GDF Suez, a réagi depuis Paris à l'annonce du décès de M. Desmarais.

«C'était bien sûr une grande figure des affaires, une figure rare, mais avant tout un industriel  et un homme de vision, un  grand bâtisseur. Il avait l'entreprise dans le sang. C'était une personnalité très attachante, d'une grande simplicité, fidèle à des valeurs, à un territoire et ouvert sur le monde, un humaniste. 

Notre Groupe lui doit beaucoup. Aux côtés d'Albert Frère, avec ses fils, il a accompagné, comme actionnaire, pendant près de 20 ans, tous les grands moments de l'histoire de notre Groupe : la mutation de Suez en un groupe industriel, les différentes fusions et mouvements (Lyonnaise des Eaux, Société Générale de Belgique, Tractebel, Electrabel) jusqu'à la création de GDF SUEZ. 

J'avais à coeur chaque année de participer à la Conférence de Montréal, qu'il avait inspirée avec son fils Paul Junior pour réunir des décideurs du monde entier sur les grands enjeux internationaux. Il était en effet toujours très attentif à anticiper, mais aussi à lutter contre les déséquilibres, les inégalités. Il était attaché à l'idée d'un progrès partagé», a-t-il déclaré à La Presse.

Toute une région en deuil

À Saint-Siméon, dans la région de Charlevoix, le décès de l'homme d'affaires Paul Desmarais est sur toutes les lèvres.

«Monsieur Paul» comme plusieurs l'appelaient, aidait à régler des dossiers juste par sa présence à Sagard.

Les élus locaux sont reconnaissants pour sa grande contribution à la région.

C'est le cas de l'ex-maire de Saint-Siméon et ancien préfet de la MRC de Charlevoix-Est, Pierre Asselin, qui a connu M. Desmarais alors qu'il était entrepreneur général. Il a notamment construit quelques bâtiments au domaine de Sagard, propriété du fondateur de Power Corporation.

«C'est quasiment un père pour moi. Quand je le rencontrais, c'était comme père et fils», a affirmé M. Asselin, qui précise que cette relation, de type familial, s'est poursuivie lors de son passage à la mairie et comme préfet.

Paul Desmarais et sa famille ont fait des donations de plusieurs millions de dollars à des organisations régionales comme l'hôpital de La Malbaie, le Musée de Charlevoix et le Domaine Forget.

Le Domaine Laforest de Sagard, évalué à 50 millions $, est une entreprise majeure dans Charlevoix. Durant la saison estivale, près de 200 personnes travaillent à l'entretien de ses vastes terrains, incluant un terrain de golf classé comme étant l'un des plus beaux du Québec.

- Journalistes qui ont participé à l'écriture de ce texte: Caroline Touzin, Hugo Pilon-Larose, Joël-Denis Bellavance, Hugo de Grandpré, Vincent Brousseau-Pouliot, Martin Vallières, Maxime Bergeron, Marie Tison, Paul Journet avec La Presse Canadienne