L'ex-dirigeante d'une agence municipale de développement qui s'est recyclée dans le lobbyisme immobilier a omis à trois reprises de rendre publiques des informations importantes sur son travail.

Elle avait notamment jugé bon de taire qu'elle avait tenu les rênes d'un organisme paramunicipal pendant quatre ans.

Le Commissaire au lobbyisme, responsable de l'application de la loi, écarte toutefois la possibilité d'imposer une amende à Suzanne Deschamps.

Celle-ci a quitté la Société de développement de Montréal (SDM) en 2006, à la veille de sa fusion avec la controversée Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM), plus tard impliquée dans le scandale Contrecoeur.

Mme Deschamps fait maintenant la promotion d'un gigantesque projet de développement résidentiel (1500 à 1900 résidences) dans l'ouest de l'île, pour la firme immobilière Pacific. Elle en est vice-présidente.

Trois omissions

Dans les années qui ont suivi son départ de la SDM, Mme Deschamps a commencé à faire du lobbying sans s'inscrire au Registre des lobbyistes. Elle ne l'a fait qu'en 2010, après le dépôt d'une plainte par un citoyen opposé au projet.

Elle a toutefois déclaré que ses pratiques de lobbyisme avaient commencé cette année-là, en 2010, soit bien après le début réel de ses activités. Ce problème a donné lieu à une nouvelle plainte, suivie d'une nouvelle demande de correction de la part du Commissaire au lobbyisme.

«Tous ces manquements sont prescrits au plan pénal», a toutefois indiqué le Commissaire dans un «suivi de la plainte» écrit envoyé au citoyen qui avait déposé la plainte. «Mme Deschamps a été avisée formellement des manquements qui lui sont reprochés et du fait qu'elle pourrait faire l'objet de sanctions en cas de récidive.»

Finalement, il y a quelques jours, le Commissaire au lobbyisme a obligé Suzanne Deschamps à indiquer qu'elle avait dirigé la SDM de 2002 à 2006. La femme d'affaires indiquait auparavant ne pas avoir occupé de «charge publique antérieure».

«On ne considère pas que c'est une fausse déclaration», a indiqué le porte-parole Daniel Labonté, du bureau du Commissaire au lobbyisme. Selon lui, la fusion et la transformation de la SDM en SHDM a pu avoir semé «une certaine confusion».

Jointe au téléphone, Mme Deschamps a indiqué que le problème était issu de «l'interprétation de ce qu'est une «charge publique» «. Elle n'a pas voulu commenter davantage le dossier, ne voulant pas «entrer dans les détails».

Mme Deschamps a toutefois invoqué sa «bonne foi».

Perte de temps?

Le citoyen à l'origine des trois plaintes milite ouvertement contre le superprojet immobilier mis de l'avant par la firme Pacific. Campbell Stuart, maire de Montréal-Ouest jusqu'en 2009, est frustré de voir que Suzanne Deschamps peut s'en sortir sans plus de conséquences.

Le Commissaire au lobbyisme «dit tout le temps qu'il n'a pas les pouvoirs nécessaires pour faire des suivis, mais on lui donne des informations et il ne s'y intéresse pas», a-t-il déploré en entrevue téléphonique. «Pourquoi je perds mon temps à leur souligner ce genre de choses?», a-t-il ajouté.

Suzanne Deschamps fait du lobbying pour la construction d'un grand quartier résidentiel sur le terrain de golf Meadowbrook, à Lachine. Le projet est baptisé Petite-Rivière et ne semble pas rallier l'appui de l'hôtel de ville de Montréal.