Le Québec n'en a pas fini avec la francisation de ses immigrés: plus de 200 000 d'entre eux ne parlent pas français, indiquent les dernières données de Statistique Canada.

Le rapport intégral de Statistique Canada (PDF)

Bref, un immigré sur cinq au Québec ne peut tenir une discussion en français. Pourtant, des dizaines de milliers d'entre eux sont arrivés au pays dans les années 80 et même avant.

Les données de l'Enquête nationale auprès des ménages (ENM), réalisée en 2011, dressent notamment un portrait des immigrés et des langues qu'ils maîtrisent.

Il en ressort que, parmi les immigrés qui vivent au Québec, 160 000 ont déclaré ne parler que l'anglais et 43 000 ne maîtrisent aucune des deux langues officielles du Canada.

Le Québec est toutefois la terre d'accueil de 275 000 personnes qui s'expriment uniquement dans la langue de Molière.

Et près d'un demi-million de ces gens venus d'ailleurs sont capables de discuter dans les deux langues officielles.

Parmi les immigrés au Canada qui n'ont qu'une seule langue maternelle, près du quart ont indiqué qu'il s'agit de l'anglais et 3,4%, du français.

Le Parti québécois, maintenant au pouvoir, avait promis en campagne électorale d'intensifier les efforts de francisation des immigrés allophones. Les données de l'ENM pourront donner au gouvernement un portrait assez précis de ceux qui échappent à son programme de francisation.

Parmi ceux qui ne maîtrisent pas le français, environ 30 000 sont arrivés récemment, soit depuis 2006.

On pourrait croire que leur non-compréhension de la langue est attribuable à leur arrivée récente au pays, mais 35 000 d'entre eux ont immigré dans les années 90 et ne parlent toujours que l'anglais ou une langue étrangère. Plus de 30 000 n'ont pas appris le français même s'ils sont venus au Canada avant 1970.

Cette situation découle du fait que des immigrés arrivés il y a longtemps ont décidé à l'époque de s'orienter vers l'anglais et ont fait leur vie dans cette langue, explique Jean-Pierre Corbeil, responsable du programme linguistique à Statistique Canada.

Il fait toutefois valoir que la loi 101 a eu ses effets.

Au Québec, beaucoup plus d'immigrés apprennent désormais le français avant l'anglais. Statistique Canada évalue cette situation en demandant aux immigrés laquelle des deux langues officielles du Canada ils ont apprise en premier.

«La première langue officielle parlée donne une certaine indication de la langue qui sera utilisée dans l'espace public», explique M. Corbeil.

Parmi les immigrés arrivés avant 1996, 33% se tournaient alors vers l'anglais. Cette proportion n'est plus que de 20% dans les dernières années.

Et l'inverse est vrai pour le français: en 1996, 46% apprenaient le français d'abord, et leur proportion n'a pas cessé d'augmenter pour atteindre 58% en 2011.

M. Corbeil constate «une progression de l'utilisation du français qui découle en grande partie des choix et de la politique du Québec, qui sélectionne plus d'immigrants qui ont une connaissance du français».

Les données diffusées mercredi par Statistique Canada proviennent de l'Enquête nationale auprès des ménages, un sondage volontaire effectué en 2011, qui remplaçait alors le long formulaire obligatoire du recensement. Le changement de méthode de collecte de données fait en sorte qu'elles sont moins fiables et les comparaisons entre les années sont risquées, avertit l'agence.