En moins d'un an, le propriétaire d'une importante clinique de physiothérapie montréalaise a réussi à frauder la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) et la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) pour obtenir plus de 1 million. Grâce à la complicité de ses employés, l'homme a mis en place un système détaillé et inondé les organismes gouvernementaux de milliers de factures pour des traitements fictifs ou offerts par des personnes qui ne détenaient pas la formation nécessaire.

Entre l'été 2009 et l'été 2010, Mottie Gorzhevsky, alors propriétaire de la clinique OrthoMed sur l'avenue Van Horne, à Outremont, a envoyé plus de 1500 fausses factures à la CSST et près de 1000 à la SAAQ, a découvert son ordre professionnel. Afin d'attirer des clients, il annonçait haut et fort son partenariat avec les deux organismes floués. «Gratuit pour les accidents de travail et les accidents de voiture», lit-on notamment dans une publicité publiée en 2011 dans un journal local.

Son stratagème, longuement expliqué dans un jugement sévère du comité de discipline des physiothérapeutes, était simple. Soit il demandait un remboursement pour un traitement que le patient n'avait jamais reçu, soit il faisait exécuter le traitement par un thérapeute sportif et réclamait les tarifs d'un physiothérapeute. «Pendant ce temps, nous étions pleinement facturés», explique le porte-parole de la CSST, Jacques Nadeau.

Afin de lui faciliter la tâche, au moins deux de ses collègues ont accepté plus d'une fois de signer des formulaires de demande de remboursement de frais, alors qu'ils n'avaient pas traité les patients. Ils ont été condamnés à payer des amendes par leur ordre professionnel il y a quelques mois. Deux thérapeutes sportifs se sont pour leur part fait passer pour des physiothérapeutes auprès de la clientèle et ont été poursuivis devant les tribunaux pour usurpation de titre.

Récidive

Au terme d'une longue enquête, M. Gorzhevsky vient d'être radié pour cinq ans par son comité de discipline. Ce n'est pas la première fois. Il a été puni en 2008 pour une fraude semblable, bien que de moindre ampleur. Le syndic avait toutefois été plus clément, car il avait estimé que M. Gorzhevsky était «repentant» et avait «modifié son comportement». Cela n'aura pas duré.

Cette fois, en plus d'une radiation, le professionnel pourrait devoir répondre à des accusations de fraude devant les tribunaux en plus d'avoir à se défendre au civil.  

Seulement à la CSST, on réclamait jusqu'à tout récemment au propriétaire et à sa clinique 1,1 million en dommages dans le cadre d'une poursuite au civil qui s'est réglée à l'amiable pour la somme très inférieure de 200 000$. C'est sans compter les centaines de factures qui ont été refilées à la SAAQ.  

Ce deuxième organisme a d'ailleurs déposé neuf plaintes au Directeur des poursuites criminelles et pénales contre le professionnel et la clinique OrthoMed.  

Le porte-parole de la CSST confirme que des plaintes ont aussi été déposées à la police par son employeur. «Ce n'est pas exclu que des poursuites soient intentées contre d'autres anciens employés de la clinique», prévient le directeur des communications de l'Ordre professionnel de la physiothérapie du Québec, Thierry Vogler.

Le bâtiment de l'avenue Van Horne a été récemment racheté par Concordia Physio Sport et Mottie Gorzhevsky n'y travaille plus. Selon le registre des entreprises, il est toujours propriétaire du nom.

Il n'a pas rappelé La Presse, hier.