Le Québec devrait servir d'exemple à Stephen Harper dans ses relations avec les autochtones, ont prétendu Bernard Landry et Thomas Mulcair au cours des dernières semaines. Vrai ou faux?

Claude Gélinas, professeur d'anthropologie à l'Université de Sherbrooke, répond en souriant que si le Québec prête souvent une meilleure oreille, c'est que contrairement à l'Ouest canadien où les autochtones ont renoncé par traité à des terres, ce n'est pas le cas ici (exception faite des Cris*). «Il n'est pas exclu qu'un jour, les Innus, les Attikameks et les Algonquins obtiennent un jugement favorable des tribunaux qui obligerait le Québec à leur céder une partie du territoire. En Cour suprême, le Québec aurait probablement une chance sur deux de perdre. Ce risque le rend sûrement plus ouvert la discussion!»

Ghislain Picard, président pour le Québec de l'Assemblée des Premières Nations et sympathisant d'Idle No More, rappelle pour sa part qu'avant cette paix des Braves citée en exemple par Bernard Landry, «il y a eu une grande incertitude politique entre 1975 et 1982. La nation crie s'est retrouvée devant les tribunaux pour démontrer que Québec et Ottawa avaient manqué à leurs obligations contenues dans la Convention de la Baie-James.»

Cela étant, reconnaît-il, pour qu'il y ait cette paix des Braves avec les Cris* «il fallait tout de même qu'il y ait une volonté politique dans ce sens, une volonté politique qui fait défaut à Ottawa actuellement», dit Ghislain Picard.

*En 2002, les Cris ont renoncé à toute poursuite et reçu en échange 4,5 milliards et demi au cours du demi-siècle à venir, l'aménagement du complexe hydroélectrique Rupert-Eastmain et une voix dans le développement du Nord.

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Mythe ou réalité?

LES INDIENS NE PAIENT NI IMPÔTS NI TAXES.

C'est vrai des Indiens inscrits qui habitent et qui travaillent dans une réserve. Ces Indiens sont aussi exemptés de taxes sur les services et les biens qui sont acquis ou livrés dans la réserve. Les autres paient impôts et taxes, tout comme les Inuits, qui doivent en plus payer beaucoup plus cher pour toute denrée en raison des hauts coûts de transport de la nourriture.

DANS LES RÉSERVES, LES INDIENS ONT DROIT À DES MAISONS GRATUITES.

De façon générale, ce sont les conseils de bande qui, forts de divers programmes en matière d'habitation, louent les maisons aux autochtones. Des programmes relativement récents permettent à certaines conditions d'acheter ou de rénover une maison située dans une réserve, mais le terrain sur lequel la maison se trouve n'appartiendra généralement pas au particulier, mais à la réserve. Comme les biens immobiliers dans une réserve ne peuvent pas être hypothéqués par un prêteur privé, le Ministère accorde certaines garanties de prêt.

LES REVENDICATIONS TERRITORIALES SONT SANS FONDEMENT.

En fait, au pays plusieurs jugements sont venus confirmer l'à-propos de diverses revendications. L'ennui, c'est que le processus est long et coûteux. Depuis 1973, selon l'estimation du ministère des Affaires indiennes, 366 revendications particulières (fondées sur des traités) ont été réglées, tandis qu'il en reste 342 dans le collimateur. Toujours depuis 1973, 24 revendications globales (non fondées sur des traités) ont été réglées, tandis que 93 autres sont en cours d'étude ou de négociation.

Source: d'après le ministère des Affaires indiennes

LES ÉTUDES POST-SECONDAIRES SONT GRATUITES POUR LES INDIENS.

Les Indiens inscrits présentent leur demande de financment à leurs conseils de bande. Des frais de subsistance (coûts de la nourriture, logement, transport) et des frais de déplacement (pour retourner chez soi deux fois par année) peuvent aussi être remboursés. Les Inuits peuvent aussi être admissibles à une aide semblable.

LES INDIENS NE SONT PAS DES CITOYENS À PART ENTIÈRE.

Ils relèvent toujours de la loi sur les Indiens - longtemps appelée Loi sur les Sauvages - qui les assimile à des pupilles de l'État. Ottawa agit à titre de fiduciaire à l'égard des autochtones. Certains articles de la loi ont été revus au fil des ans, notamment celui qui enlevait le statut d'Indienne à une femme qui épousait un non-Indien. L'idée de se débarrasser de cette loi est souvent évoquée, mais elle rencontre une résistance certaine chez plusieurs autochtones dont la vie est depuis si longtemps organisée sous ce régime.