Le Canada obtient une rare bonne note pour ses efforts dans la lutte contre la corruption de fonctionnaires étrangers, selon le rapport annuel de Transparency International.

Depuis des années, Transparency International a plutôt eu tendance à critiquer le Canada pour sa passivité en la matière. «Avec 34 enquêtes en cours, le Canada se joint à l'Australie et à l'Autriche parmi ceux qui se sont le plus améliorés», souligne l'ONG établie à Berlin.

«Enfin, la GRC a plus de ressources pour mener des enquêtes, se réjouit la présidente du conseil d'administration de Transparency International, Huguette Labelle. C'est essentiel, parce que le crime économique est compliqué. Les facilitateurs sont bien nantis et peuvent bien dissimuler la trajectoire des paiements.»

Le nombre d'enquêtes criminelles a augmenté de 50% l'an dernier au Canada, la GRC ayant mis sur pied des unités d'enquêtes à Ottawa et à Calgary. Seize enquêteurs scrutent désormais à temps plein les pratiques des entreprises canadiennes qui font des affaires dans des pays du tiers-monde.

Ces nouvelles ressources ont permis une première grosse prise: Niko Resources Ltd, une firme d'exploration pétrolière de Calgary, a plaidé coupable l'an dernier d'avoir corrompu le ministre de l'Énergie du Bangladesh en 2005. L'entreprise a payé une amende de 9,5 millions de dollars.

34 enquêtes

La plupart des 34 entreprises, qui font actuellement l'objet d'une enquête, seraient impliquées dans l'exploitation des ressources naturelles de pays en voie de développement. Mais il y a au moins une firme d'ingénierie: SNC-Lavalin, dont les récents déboires sont résumés dans le rapport de Transparency International.

Le document souligne que la GRC a mené des perquisitions dans les bureaux de SNC-Lavalin dans le cadre d'une enquête sur l'attribution d'un contrat de construction d'un pont au Bangladesh. Le rapport indique également que le PDG de la firme a démissionné, et que le patron de la division construction a été arrêté en Suisse, où il est accusé de fraude, de corruption et de blanchiment d'argent en Afrique du Nord.

«J'espère que [SNC-Lavalin] coopère avec les enquêteurs. C'est à son avantage», dit Mme Labelle.

Quand l'entreprise allemande Siemens a été condamnée à verser près de 4 milliards de dollars dans une affaire de corruption, elle n'a pas adopté une «attitude défensive», souligne-t-elle. «Siemens a ouvert ses livres aux enquêteurs. Beaucoup de têtes ont roulé, et l'entreprise s'est donné des moyens rigoureux pour empêcher que ces choses se reproduisent. Depuis, Siemens fait plus d'argent qu'avant - parce qu'elle n'a plus à verser de pots-de-vin!»

Transparency International juge que le Canada fait désormais une application «modérée» du texte de la Convention de l'OCDE contre la corruption, adoptée en 1997. Jusqu'ici, l'ONG avait jugé cette application «faible» ou «inexistante».

Davantage de ressources

L'organisme recommande au Canada d'accorder des ressources supplémentaires à la lutte contre la corruption. «C'est plus un investissement qu'une dépense: si nos enquêteurs empêchent l'évasion fiscale, c'est notre trésor national qui en profite», dit Mme Labelle.

Enfin, Transparency International recommande au Canada de modifier la loi afin que les enquêteurs, encore trop peu nombreux, ne perdent plus leur temps à tenter de prouver que les entreprises canadiennes impliquées dans des activités de corruption ont un «lien réel et substantiel» avec le Canada.