Le gouvernement Harper se défend de cibler injustement les contribuables les plus vulnérables en luttant contre la fraude au programme de prestation fiscale pour enfants.

L'Agence du revenu du Canada (ARC) affirme simplement prendre les moyens pour bien gérer les fonds publics.

«Comme dans tout autre programme géré par l'ARC, on retrouve toujours certains éléments de fraude, et un des buts de nos programmes d'observation est d'identifier ces cas et d'y donner suite», indique Philippe Brideau, conseiller principal en relations avec les médias et porte-parole de l'ARC, dans un courriel envoyé à La Presse.

«De nouvelles activités d'observation sont régulièrement mises en place pour assurer qu'aucun segment en particulier de la population n'est ciblé d'année en année», ajoute-t-il.

De 4 à 6 fraudes par année

Malgré l'ampleur des moyens mis de l'avant par l'Agence pour débusquer les fraudeurs, la récolte reste plutôt maigre. Depuis cinq ans, l'ARC affirme avoir repéré de quatre à six comptes frauduleux de prestation fiscale pour enfants par année. Le total des sommes obtenues illégalement a varié entre 40 000$ et 173 400$ chaque année depuis 2005-2006, toujours selon l'ARC.

Les fraudes les plus courantes consistent à réclamer la prestation pour des enfants fictifs, ou encore à omettre de déclarer des revenus, ce qui fait augmenter le montant des prestations, selon l'ARC.

Si le nombre de fraudes reste peu élevé, les enquêteurs mettent aussi à jour des «irrégularités» ou des «erreurs» de comptes qui se règlent par simple entente administrative, indique-t-on à l'Agence du revenu. Une des «irrégularités» les plus fréquentes consiste à omettre de déclarer au fisc des unions conjugales ou des unions de fait.

Sans faire de commentaire à propos d'un cas particulier, Philippe Brideau s'étonne toutefois que les prestations d'un contribuable aient été suspendues pendant la vérification d'un compte, comme l'ont affirmé deux mères de famille à La Presse.

«Lorsque le bénéficiaire éprouve des difficultés dans l'obtention des documents ou a besoin de temps supplémentaire, il peut tout simplement communiquer avec l'Agence afin de demander une prolongation», écrit le porte-parole de l'ARC.

Des «Harper macoutes»

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) soutient que cette chasse aux fraudeurs représente de l'acharnement injustifié contre les Canadiens les plus démunis. Le parti de Thomas Mulcair, qui forme l'opposition officielle aux Communes, compte questionner le gouvernement sur ses méthodes de «vérification de comptes» dès la rentrée parlementaire à Ottawa, à l'automne.

«On comprend qu'il faut s'attaquer à la fraude, mais le gouvernement tente de faire des économies de bouts de chandelle en ciblant les personnes les plus vulnérables», affirme Hoang Mai, député de Brossard-La Prairie et porte-parole du NPD en matière de revenu.

Le député affirme que son parti a reçu depuis un an des dizaines de plaintes de contribuables ciblés par l'Agence du revenu, surtout dans l'est du Québec. Au même moment, le gouvernement baisse les impôts des entreprises, resserre les règles d'accès à l'assurance-emploi et donne un tour de vis aux organismes de charité, épargnant ainsi les Canadiens les plus riches, souligne le NPD.

«Toute cette histoire me fait penser aux Boubou macoutes», affirme le député Hoang Mai. Les groupes de défense des droits sociaux avaient baptisé Boubou macoutes les enquêteurs lancés aux trousses des prestataires d'aide sociale par le gouvernement de Robert Bourassa, dans les années 80.

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Année / Nombre de vérifications / Nombre de fraudes détectées / Total

2005-2006 / 176 178 / 4 / 40 005$

2006-2007 / 207 192 / 4 / 63 160$

2007-2008 / 159 396 / 4 /  173 400$

2008-2009 / 166 300 / 4 /  101 960$

2009-2010 / 169 199 / 4 / 98 493$

2010-2011 / 181 543 / 6 /  142 040$

Source: Agence du revenu du Canada