Selon un bilan du Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), un organisme qui milite pour le droit au logement, au moins 86 ménages québécois se sont retrouvés sans logis, hier, au terme de la journée de déménagements du 1er juillet.

Montréal est relativement épargné par le phénomène: seulement cinq familles n'ont pas encore trouvé d'endroit où habiter. Mais Gatineau, avec 41 familles sans logement hier, et Rouyn-Noranda, avec 32 ménages dans la même situation, vivent une crise beaucoup plus aiguë.

Certains cas non rapportés peuvent évidemment avoir échappé au recensement de l'organisme.

Le FRAPRU concède que la situation est beaucoup moins grave qu'elle ne l'a été au début des années 2000. L'organisme est toutefois préoccupé par une tendance lourde qu'il voit se profiler sur le marché: l'abandon pur et simple des logements locatifs par les promoteurs privés, qui se tournent vers les copropriétés.

«À peine 7161 logements locatifs privés ont été mis en chantier au Québec en 2011. C'est 32% de moins qu'en 2007. Dans la région métropolitaine de Montréal, la diminution a été de 58% et, dans l'île même, de 78%», constate François Saillant, coordonnateur du FRAPRU.

La situation s'annonce encore pire pour les locataires en 2012, car à peine 160 unités de logements locatifs privés ont été mises en chantier au cours des cinq premiers mois de l'année.

Copropriétés plus payantes

Selon le FRAPRU, il est évident que les entrepreneurs privés ne désirent plus fournir d'appartements à louer, car les copropriétés assurent plus facilement un «profit très juteux» et immédiat.

Par ailleurs, les locataires anciennement plus fortunés auraient acheté des propriétés au cours des dernières années; par conséquent, il n'y aurait plus assez de locataires capables de payer les loyers élevés des appartements neufs. «C'est bien beau de construire des appartements à 1000$ ou 1200$ par mois à Montréal, Québec ou Gatineau, mais encore faut-il qu'il y ait des locataires capables de les louer», explique M. Saillant.

Déjà, le loyer moyen d'un appartement de deux chambres à Montréal dépasse les 700$, selon le FRAPRU.

Les gens moins favorisés, qui ne peuvent acheter une propriété, ne comptent donc plus que sur les gouvernements et leurs parcs de logements sociaux, selon l'organisme.

«On n'en est pas à blâmer les constructeurs privés, on dit seulement que ce n'est pas sur eux qu'il faut compter. C'est aux gouvernements d'agir. Ils se sont engagés à faire respecter le droit au logement, eh bien, qu'ils le fassent!», a lancé M. Saillant lors d'un point de presse, hier.

Le FRAPRU est particulièrement dur envers le gouvernement fédéral, qu'il accuse de verser «des pinottes» pour le logement social, même si les ménages à faible revenu tirent toujours le diable par la queue.