L'heure de la retraite a sonné de manière brutale pour Michael Lynch, éleveur porcin de L'Avenir, village situé tout près de Drummondville.

Le 21 décembre dernier, à l'aube, la fumée a commencé à s'échapper d'un bâtiment dans lequel s'entassaient environ 1200 porcs. «Les pompiers sont arrivés en 15 minutes. Mais tout s'était effondré comme un château de cartes. Une bâtisse agricole, c'est sec comme des os», illustre M. Lynch.

Seulement 225 bêtes ont pu être sauvées du sinistre. La décision de ne pas rebâtir n'a pas été facile à prendre. Les assurances ont remboursé M. Lynch. Comme il ne reconstruit pas le bâtiment, on lui a retranché 40% de la valeur de sa ferme. «J'ai 61 ans. Je n'avais pas envie de recommencer, m'endetter encore et avoir des cochons jusqu'à 80 ans», raconte M. Lynch, qui tient aussi une petite auberge.

Le sexagénaire a interrompu une longue tradition familiale, qui remonte à 1845. «Mon arrière-grand-père a défriché les terres ici en débarquant d'Irlande.»

Le fils de Michael Lynch, Sydney, représentait d'ailleurs la cinquième génération à travailler sur la terre.

Dix minutes

Dix minutes. C'est le temps qu'ont pris les flammes pour ravager une partie de la ferme laitière des Huard à Saint-Alphonse-de-Granby, dans la nuit du 28 octobre dernier.

Quelques mois plus tard, les ossements de vache traînent toujours au milieu d'un immense terrain en ruine, où s'élevaient plusieurs bâtiments de ferme, chemin Choinière, au coeur d'un secteur très agricole de la Montérégie.

À notre passage, Normand Huard, son fils Martin et son gendre, Philippe Tarte, travaillaient près du terrain calciné. Incendie ou pas, la vie continue. Ils doivent miser sur les 150 bêtes entassées dans une autre partie de leur ferme.

Mais les pertes totalisant environ 1 million de dollars ont sérieusement compromis leur production.

Quant à la nature du sinistre, elle reste inconnue. «On n'a pas encore eu les conclusions de l'enquête. On pense que c'était électrique. Peut-être un rongeur qui a grugé des fils», suggère Normand Huard, qui a transmis l'entreprise familiale à ses enfants et à son gendre. Pour M. Huard, il est impensable qu'une main criminelle soit à l'origine du brasier. Et encore moins un geste délibéré pour toucher l'argent des assurances. «J'ai de la relève, moi, alors c'est sûr que je vais reconstruire. Et dans le lait, on n'est jamais mal pris avec des quotas», explique M. Huard.

Les inspections, tant des assureurs que des services incendie, étaient régulières à sa ferme. Celles-ci sont même plus rigoureuses depuis quelques années, avec l'informatisation des bâtiments et du travail de ferme.

Incendie suspect

À environ 30 kilomètres de là, sur ce qui reste de la façade de l'érablière de la Chute, à Upton, une inscription à la peinture a été barbouillée. «Couvert par Intact assurance.»

Un graffiti ironique signé Guy Joubert, propriétaire de l'érablière. C'est lui qui a alerté les pompiers en voyant les flammes ravager sa cabane à sucre dans la nuit du 9 février 2011. Comme sa maison est à Saint-Liboire et son érablière - pourtant au bout du même terrain - est à Upton, un imbroglio avec les pompiers des deux municipalités a retardé leur intervention, croit M. Joubert.

Lorsque les pompiers ont commencé à arroser sa cabane à sucre, il était trop tard. Les policiers considèrent l'incendie comme suspect: ils disent avoir trouvé trois foyers d'incendie. Pour cette raison, les assurances refusent de dédommager M. Joubert, qui devra se tourner vers les tribunaux. «Je venais tout juste d'acheter un lave-vaisselle de 11 000$ et les affaires roulaient bien. Notre salle pouvait accueillir 600 personnes et on y organisait beaucoup de mariages», explique Guy Joubert.

Il réclame 1 million de dollars de ses assurances. «Si je reçois mes assurances, je vais me rebâtir. Mais il faudrait que ça se fasse vite, puisque ma clientèle va aller ailleurs.»