En brimant les droits des travailleurs, le gouvernement Harper pourrait faire face à une fronde syndicale nationale, menace un syndicat d'employés d'Air Canada.        

L'Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l'aérospatiale (AIMTA), qui représente 8600 bagagistes, mécaniciens et agents de fret d'Air Canada, réagissait à l'adoption d'une loi spéciale leur retirant le droit de grève.

Cette loi, passée sous le bâillon au beau milieu de la nuit de mardi à mercredi, impose un processus d'arbitrage et interdit toute grève ou lock-out jusqu'à ce qu'une nouvelle convention collective soit signée. En plus de ces 8600 employés, le projet de loi C-33 touche également 3000 pilotes.

Les représentants syndicaux étaient accompagnés de députés du NPD et du Parti libéral, ainsi que du chef du Bloc québécois, lors d'un point de presse au parlement d'Ottawa. D'une même voix, ils se sont dits inquiets de l'intervention du gouvernement Harper dans leur dossier, qui selon eux brime les droits fondamentaux et démocratiques des travailleurs.

«Ma crainte est que ce ne soit qu'un début, a insisté le président de la section locale 1751 de l'AIMTA à Montréal, Marcel Saint-Jean. Est-ce que c'est la fin des libres négociations collectives à travers le Canada? Il y a des sérieuses questions que l'on doit se poser aujourd'hui.»

«Ce n'est pas la fin, a toutefois renchéri M. Saint-Jean. M. Harper, très bientôt, et je ne mets rien sur la table, mais très bientôt, il va se rendre compte que les travailleurs sont nombreux dans ce pays. Peut-être qu'il est là pour les prochains quatre ans. Mais je vais travailler très fort pour qu'il n'y retourne pas.»

La ministre du Travail, Lisa Raitt, a justifié son intervention dans le dossier par la fragilité de l'économie canadienne et le besoin de protéger les voyageurs en période de relâche scolaire.

Ce n'est pas la première fois que le gouvernement se sert de l'arme de la loi spéciale pour intervenir dans une négociation houleuse depuis sa réélection le 2 mai. Il l'a fait au printemps et à l'automne contre d'autres employés d'Air Canada et contre ceux de Postes Canada.

Le projet de loi C-33 est au Sénat depuis ce matin, qui devrait l'adopter d'ici la fin de la semaine.

À noter que les quelque 11 000 employés touchés n'étaient pas sur le point de faire la grève, puisque la ministre Raitt avait envoyé leur dossier au Conseil canadien des relations industrielles pour déterminer si un arrêt de travail au Canada pourrait mettre la santé et la sécurité des Canadiens en danger. L'examen du conseil pourrait prendre plusieurs semaines et les activités du transporteur aérien doivent être maintenues entretemps.