Alors que l'Unité permanente anticorruption (UPAC) fête son premier anniversaire toujours sans avoir attrapé de gros poisson dans ses filets, La Presse a appris que la brigade Marteau, son bras armé, s'apprête à déménager, seule, dans des locaux du Vieux-Montréal.

L'UPAC, c'est une année d'existence le 18 février, 170 employés, 30 millions de dollars de budget, des démissions, des controverses et des allégations d'influence politique, des luttes de clans, mais peu de succès malgré les promesses répétées de coups d'éclat.

Au cours des derniers mois, certaines unités ont même traîné les pieds pour intégrer les bureaux de l'UPAC, rue Fullum, un regroupement qui devait favoriser l'osmose nécessaire entre toutes les composantes.

Or, cette étape est à peine terminée que les policiers de l'escouade Marteau de la Sûreté du Québec vont quitter les lieux pour occuper leurs propres locaux. Pas question pour eux d'attendre que l'UPAC emménage dans un nouvel immeuble, probablement sur la Rive-Sud, d'autant plus qu'ils sont dispersés sur deux étages et se sentent à l'étroit.

L'UPAC nie des informations faisant état de certaines tensions entre sa haute direction et les policiers de Marteau, habitués à ne traiter qu'avec leur propre hiérarchie.

À l'UPAC, on assure aussi que cela n'aura aucune conséquence sur les opérations.

«Nous allons continuer à travailler comme avant», dit la porte-parole Anne-Frédérick Laurence.

Au mois de septembre, on parlait d'une frappe à venir qui «ratisserait large» dans un délai calculé en semaines et «pas en mois». La seule opération a eu lieu en avril dernier: des perquisitions en Montérégie chez des acteurs mineurs de la construction.

La seule arrestation avec dépôt d'accusations concerne Tony Tomassi (fraude et abus de confiance) pour avoir utilisé à des fins personnelles une carte de crédit de l'ancienne firme de sécurité BCIA. Mais l'ex-député du parti libéral du Québec avait déjà reconnu les faits.

La dernière annonce de l'UPAC, il y a quelques jours, est un dossier fermé par le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) sans accusation criminelle, celui de «l'interception des communications électroniques» à l'hôtel de ville de Montréal.

«Les criminels en prison»

Lors de la création de l'organisme, le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, avait pourtant placé la barre assez haut. «Sur une base régulière, le commissaire à la lutte contre la corruption aura l'obligation de divulguer les modus operandi employés par les personnes et les entreprises malhonnêtes. Ainsi, nous aurons les stratagèmes à la télévision et les criminels en prison», avait-il déclaré.

Denis Morin, patron de Marteau, avait incité la population à la patience, en novembre dernier. «De beaux dossiers s'en viennent. Ce sont des dossiers très complexes, certains ont plus d'envergure que d'autres», avait-il affirmé.

«Nous aussi, nous avons hâte de donner des résultats», souligne Anne-Frédérick Laurence, qui réfute tout blocage dans le bureau du Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Impossible aussi de connaître le nombre d'enquêtes en cours.

La loi créant l'UPAC prévoit aussi que «le commissaire communique au public l'état de ses activités au moins deux fois par année et au plus tard huit mois après sa dernière communication». Le dernier bilan remonte au 3 octobre. Nul ne sait quand aura lieu la prochaine communication.

Chose certaine, le commissaire de l'UPAC, Robert Lafrenière, aura vécu un automne cauchemardesque. Son indépendance a été remise en question en raison de ses liens familiaux avec le sous-ministre de la Sécurité publique et le fait que son frère soit chargé de la sécurité de Jean Charest.

D'autres départs?

Une autre démission est survenue depuis, celui de la chef préventionniste. Son poste n'a pas été pourvu.

Une autre vague pourrait survenir au mois d'avril lorsque viendront à échéance des contrats parmi la quinzaine d'enquêteurs-analystes de l'Unité anticollusion. Certains employés contractuels pourraient choisir de partir, ou encore leur contrat ne serait pas renouvelé. «L'UPAC a besoin d'expertises diverses, et nous sommes ouverts et discuterons avec les personnes concernées en temps et lieu», assure Anne-Frérérick Laurence.

Selon certaines sources, il y aurait toujours une grande méfiance de la part des dirigeants envers certains de ces vétérans de la SQ, de la GRC et du SPVM.

L'UPAC vante toutefois le succès de son volet prévention, qui a déjà permis de sensibiliser près de 700 personnes liées à l'attribution de contrats dans les ministères et organismes publics.

Malgré notre insistance, il n'a pas été possible de parler avec Robert Lafrenière.