Presque huit ans après avoir été pressée de renforcer la sécurité sur les voies navigables, la GRC n'a toujours pas mené un examen des besoins de sa flotte, révèle une vérification interne menée l'an dernier. En fait, indique le document, sa gouvernance des biens maritimes est carrément «médiocre».

Le rapport, produit pour le Comité de la vérification et de l'évaluation de la GRC, est daté de décembre dernier. Il ne passe pas par quatre chemins pour décrire la manière dont la GRC gère sa flotte. «Du point de vue national, peut-on y lire, la gouvernance des biens maritimes est médiocre.»

La GRC, qui dispose d'environ 400 bateaux, n'a aucune stratégie nationale pour la gestion de son parc navigant, précise le rapport. Et ce, même si le Comité sénatorial sur la sécurité nationale lui a recommandé, dès 2003, de dresser un portrait des risques et des menaces pour qu'elle puisse adéquatement faire respecter la loi sur les voies navigables. «Étant donné qu'aucune analyse des besoins ou évaluation des risques n'a été effectuée, on ne sait pas à quel point le parc navigant actuel soutient efficacement le rôle opérationnel maritime, soutient le rapport de vérification, produit sept ans plus tard. Une analyse rigoureuse des besoins opérationnels permettrait également de déterminer le niveau approprié de l'actif maritime.»

D'autres examens concluent que le milieu maritime est propice au passage de clandestins, à la traite de personnes et au trafic de drogue. Le rapport sénatorial de 2003 a par ailleurs souligné que la Voie maritime du Saint-Laurent, les Grands Lacs et les fleuves Skeena et Fraser, en Colombie-Britannique, sont vulnérables à des attaques terroristes, tout comme les milliers de kilomètres de côtes qui entourent le pays.

Des recommandations suivies

La GRC fait valoir qu'elle n'est pas restée les bras croisés après le rapport sénatorial de 2003. Elle a ouvert trois centres des opérations afin d'appuyer ses agents en milieu maritime, indique sa porte-parole, Julie Gagnon. Et le nouveau rapport de vérification interne aura des suites, a-t-elle assuré.»Un examen approfondi des actifs maritimes de la GRC et des environnements dans lesquels ils opèrent est en cours», a-t-elle affirmé.

Pour l'heure, la GRC ignore si cette révision l'amènera à changer la composition de sa flotte. Elle se donne jusqu'à juin 2012 pour terminer son examen.

Les Services de police contractuel et autochtone, qui couvrent environ 75% du territoire canadien (ils sont absents au Québec et en Ontario, car ces provinces ont une police provinciale), ont également entrepris une révision de leur politique en matière de sécurité maritime. Cet exercice devrait être terminé d'ici à la fin de l'année prochaine.

Le sénateur libéral Colin Kenney, l'un des auteurs du rapport de 2003, est toujours à la tête du comité sénatorial sur la sécurité nationale. Il se garde bien de lancer la pierre à la GRC. «Je suis plus triste qu'en colère, affirme le sénateur. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un manque de volonté de la part de la GRC. Je crois qu'il s'agit plutôt d'un manque de ressources.»

Il souligne que les gouvernements, tant libéral que conservateur, ont adopté une série de lois dans la foulée du 11-Septembre, des lois qui ont imposé des tâches supplémentaires aux policiers. Mais ces mêmes gouvernements n'ont jamais donné à la GRC les moyens de remplir ces tâches. Il estime qu'il faudrait de 5000 à 7000 agents supplémentaires pour permettre à la force policière de remplir adéquatement son mandat.

- Avec William Leclerc