La réalité rattrape durement les petites villes canadiennes. Un peu partout au pays, la population vieillit et les jeunes s'exilent pour la ville; le maintien des infrastructures ainsi que le haut taux de chômage engendrent de nombreux problèmes. Mais certains villages entendent bien réagir.

Pourtant, leurs habitants savent que les chiffres ne leur sont pas favorables. Le dernier recensement indique que la population rurale représente désormais moins de 20 pour cent de la moyenne nationale, une première au pays. Et tandis que les régions semi-rurales réussissent bien, les endroits les plus isolés du pays connaissent les reculs les plus importants.

Selon Bill Reimer, professeur à l'université Concordia et directeur du projet de recherche sur la nouvelle économie rurale, les secteurs à partir desquels les déplacements vers les grandes villes sont ardus voient, de manière générale, leur taille diminuer.

M. Reimer, qui observe les villages canadiens depuis plus d'une décennie, croit qu'«à moins qu'un village soit près d'un centre urbain ou d'une attraction comme une montagne, on y constate de nombreux problèmes».

Bien que l'avenir de ces villages semble désolant, les habitants de certains de ces secteurs tentent de renverser la vapeur. Ils misent ainsi sur la créativité et l'esprit de communauté, caractéristique des petites villes.

À travers le Canada, les efforts combinés permettent ainsi la mise sur pied de coopératives, la création d'équipes sportives ou, même, de communauté pour les retraités.

Mais le défi en est un de taille dans les plus petites villes. Au Québec, plus de 80 pour cent des villes dites «dévitalisées» comptent 800 habitants ou moins.

Résultat, les municipalités peinent à offrir les services de base à leurs résidents. Les routes, systèmes d'égout et écoles, mais aussi le maintien d'épiceries et de stations-services y sont problématiques.

À Notre-Dame-de-Ham, dans le Centre-du-Québec, les citoyens ont mis sur pied une coopérative afin d'ouvrir un établissement qui regroupe un dépanneur, une station-service et un restaurant. Ils espèrent ainsi ne plus avoir à parcourir une distance de 25 kilomètres aller-retour pour acheter du lait.

La coopérative compte à présent 97 membres, soit environ le quart de la population. Ils ont fourni 35 000 $ au total.

Selon M. Reimer, le succès d'une ville repose sur les talents et les efforts de sa communauté.

Il prend la ville de Warner, en Alberta, en exemple. À partir d'un aréna en ruines et avec l'aide d'un entraîneur qualifié, cette communauté de 383 âmes a réussi à lancer une école de hockey destinée aux filles, qui est désormais reconnue sur la scène nationale.

«L'important, c'est de trouver un créneau», résume M. Reimer.

Le village québécois de Cap-à-l'Aigle, en Charlevoix, qui bénéficie d'un micro-climat favorable au lilas, a lui aussi su miser sur ses forces. Le village d'Elliott Lake, au nord de l'Ontario, est passé de ville minière à l'abandon à une communauté de retraités.

Même la ville de Springhill, en Nouvelle-Écosse, a su tirer profit d'une catastrophe. Lieu d'une des catastrophes minières les plus importantes au pays, Springhill utilise aujourd'hui l'apport en eau chaude des anciens puits de la mine comme source d'énergie géothermique.

Au Québec, un plan d'action lancé en 2008 prévoit aider les villes «dévitalisées» par le biais de subventions pour les petites communautés et d'une aide pour le maintien des infrastructures, des écoles et des services de base.

Des projets qui s'inscrivent dans la nouvelle mentalité du  gouvernement vis-à-vis le développement des petites villes, aux dires de M. Reimer.

«Avant, on voulait attirer les grosses compagnies, des producteurs de bois ou des usines», a-t-il expliqué.

«Puis, on s'est rendu compte que l'arrivée de ces grosses compagnies étrangères, dont les services sont hautement automatisés, ne permettait pas de créer autant d'emplois ou d'apporter autant de changements positifs dans le village qu'on le croyait.»