De l'avis de l'ex-ministre de la Sécurité publique Jacques Dupuis, il faut plus d'argent, plus de policiers et des peines plus sévères pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants. Québec et Ottawa dépensent déjà des dizaines de millions en ce sens. «Il devient néanmoins de plus en plus important d'injecter des sommes importantes, parce qu'il y aura toujours plus de criminels pour profiter des jeunes», dit-il en entrevue.

Redevenu avocat, M. Dupuis entend livrer ce message aujourd'hui, au Colloque international sur l'exploitation des enfants et les conduites excessives. «D'après ce que m'indique la Sûreté du Québec (SQ), il est évident que le phénomène est en pleine expansion, explique-t-il. Comme dans le cas du trafic de stupéfiants, les statistiques sont décourageantes lorsqu'on compare le nombre de personnes qu'on réussit à arrêter au nombre total de personnes qui s'y adonnent.»

En 13 ans, le nombre de policiers affectés aux enquêtes sur les cyberprédateurs est passé de 2 à 40 à la SQ, et leur nombre devra encore augmenter, affirme l'ancien ministre. Québec a par ailleurs ouvert à Percé une prison réservée aux délinquants sexuels. Le gouvernement a aussi décidé récemment de reconduire son programme de lutte contre les gangs de rue. «Un nouveau volet devrait concerner le recrutement des jeunes filles», indique M. Dupuis, qui ignore toutefois quelles sommes y seront investies.

Internet

À ses yeux, il est urgent qu'Ottawa adopte les recommandations formulées en 2007 par le groupe de travail fédéral-provincial-territorial contre l'exploitation sexuelle des jeunes. «Maintenant que les élections ont eu lieu, cela sera sans doute plus facile pour un gouvernement conservateur majoritaire», souligne-t-il.

Le gouvernement fédéral a déjà modifié la loi pour obliger les fournisseurs d'accès à l'internet à dénoncer les diffuseurs de pornographie juvénile. Il oblige les délinquants sexuels dangereux à fournir un échantillon d'ADN. D'après M. Dupuis, il reste à créer une infraction de «communication indécente» et à prévoir une peine de prison minimale obligatoire dans les dossiers d'exploitation sexuelle d'enfants. Il faudrait en outre qu'il soit impossible de purger sa peine dans la collectivité ainsi que d'obtenir un pardon.

«C'est important de donner un signal: parce qu'il s'agit d'enfants et qu'ils sont sans protection, c'est important d'être très sévère», souligne l'avocat.

L'internet a fait sauter les frontières, rappelle-t-il. Avec 1,5 milliard d'internautes dans le monde, les agresseurs et les victimes potentielles sont innombrables et les enquêtes, très complexes. Depuis 2005, quelque 4800 Québécois ont par ailleurs été inscrits au registre national des délinquants sexuels.