Le maire Régis Labeaume pourra venir expliquer aux parlementaires pourquoi il est nécessaire d'adopter une loi afin d'empêcher les contestations judiciaires contre une entente qu'il a conclue avec le conglomérat Quebecor relativement à la gestion d'un futur amphithéâtre.

M. Labeaume a finalement obtenu le consentement des six derniers députés, sur les 125 que compte l'Assemblée nationale, pour étudier d'urgence un texte législatif porté par la députée péquiste Agnès Maltais.

Le gouvernement libéral, qui finance la moitié de l'amphithéâtre, et l'opposition péquiste avaient déjà accepté cette semaine que le projet de loi soit déposé, mais étant donné les délais du calendrier parlementaire, un consentement unanime de la Chambre était nécessaire, ce qui n'était pas acquis.

L'Action démocratique du Québec (ADQ), Québec solidaire (QS) et deux députés indépendants ont finalement accepté jeudi le dépôt du projet de loi ainsi que son étude en commission parlementaire. Ils se résevent toutefois la possibilité de le bloquer, un ultime consentement unanime de la Chambre étant obligatoire pour que le texte soit soumis au vote final.

Même s'il devra marcher sur une corde raide, M. Labeaume a déclaré jeudi, lors d'un point de presse à l'hôtel de ville, qu'il était résolu à prouver que son entente est légale, bien que des avocats du ministère des Affaires municipales en doutent, étant donné l'absence d'appel d'offres.

«Notre objectif, c'est que devant tous les parlementaires et la population qu'on puisse aller vider la question et expliquer ce qu'on a fait», a-t-il dit.

Quelques minutes plus tôt, M. Labeaume avait conclu une rencontre de 90 minutes avec le député de QS, Amir Khadir, qui lui a donné l'assurance qu'il consentirait au dépôt et à l'étude du projet de loi.

Après cet entretien, M. Khadir a expliqué que pour obtenir son consentement final, M. Labeaume devra avoir démontré que l'entente n'a pas été conclue au détriment des contribuables, qui défraient la totalité des 400 millions de dollars nécessaires à la construction.

«Si c'est une loi d'exception juste pour favoriser un partenariat d'affaires qui ne démontre pas à nos yeux tout l'intérêt que ça doit avoir pour une ville, pour les contribuables surtout qui mettent la totalité de l'argent pour l'amphithéâtre, à ce moment-là on le bloquera en temps opportun», a-t-il dit, lors d'un point de presse à l'hôtel de ville.

Alors que Quebecor s'est engagé à verser entre 110 millions à 200 millions pour obtenir un contrat de gestion de 25 ans, M. Khadir a constaté que le montant des revenus tirés par l'entreprise grâce à l'entente demeure inconnu.

«Les contribuables mettent 400 millions, un demi-milliard, il me semble que les contribuables ont le droit de savoir», a-t-il dit.

Mme Maltais a répondu lundi à un appel à l'aide de M. Labeaume qui a réclamé que les députés votent une loi spéciale pour confirmer que le processus d'octroi est conforme à la loi, même s'il n'y a pas eu d'appel d'offres.

Un ancien directeur général de la Ville de Québec, Denis De Belleval, a récemment estimé que plusieurs éléments de l'entente et l'absence d'appel d'offres pourraient enfreindre la loi. M. De Belleval a réclamé des modifications, sans quoi il pourrait demander à un tribunal d'annuler l'accord.

Le souhait de M. Labeaume est d'éliminer avec une loi spéciale toute incertitude qui empêcherait la conclusion de l'entente finale avec Quebecor, et compromettrait les négociations avec la Ligue nationale de hockey (LNH) pour obtenir une équipe à Québec.

La Ville de Québec versera 187 millions pour la construction de l'édifice.

M. De Belleval s'est réjoui jeudi qu'un débat se fasse sur le processus d'octroi mais aussi sur les dispositions de l'entente qui, selon lui, favorisent Quebecor de manière exagérée.

«Au moins là on entre dans un débat démocratique au sein de l'Assemblée nationale», a-t-il dit.

En matinée, la leader parlementaire adéquiste Sylvie Roy avait annoncé qu'elle acceptait le dépôt, tout en se réservant, comme M. Khadir, la possibilité de bloquer la tenue du vote.

«On va écouter le maire, M. De Belleval, le ministère des Affaires municipales, tous les intervenants et soyez assurés que si ça n'a pas d'allure on va voter contre», a-t-elle dit.

La leader adéquiste a notamment insisté sur l'importance que l'entente conclue avec Quebecor soit bonne pour les contribuables.

La journée avait mal commencé pour le maire, quand deux députés indépendants, Éric Caire et Marc Picard, ont refusé leur consentement.

MM. Caire et Picard se sont par la suite ravisés en prenant connaissance d'un communiqué du ministère des Affaires municipales présentant deux interprétations contradictoires, celles des juristes du gouvernement et de la Ville de Québec, quant à la légalité du processus ayant mené à l'octroi du contrat à Quebecor.

«Je pense que la commission parlementaire aurait intérêt, dans ses consultations particulières, à retenir les services de juristes qui seraient capables de nous expliquer plus complètement les tenants et aboutissants et les conséquences de légiférer dans le sens qu'on va le faire», a dit M. Caire en fin de journée.