Quelques dizaines d'Algonquins du territoire de Lac Barrière, dans les Hautes-Laurentides, ont bloqué la route d'accès à leur territoire pendant quelques heures, jeudi, pour protester contre la volonté du gouvernement fédéral de leur imposer une élection.

Des luttes intestines à Lac Barrière font en sorte que la communauté n'a à peu près pas de leadership depuis près de quatre ans. Et la communauté n'a plus de gouvernement depuis octobre 2009, selon l'un de ses porte-parole, Tony Wawatie.

Au printemps dernier, le ministère des Affaires indiennes a donc fait savoir aux leaders de la communauté algonquine qu'ils devraient tenir au cours des mois suivants une élection des membres du conseil de bande. Le gouvernement fédéral a finalement annoncé que le scrutin se tiendrait mi-septembre.

Mais les activistes autochtones ont répliqué qu'en agissant de la sorte, le gouvernement du Canada viole le droit de la communauté de tenir un scrutin en conformité avec ses coutumes.

En matinée, jeudi, une cinquantaine de résidants ont donc barré le passage à un représentant du ministère des Affaires indiennes, qui devait mener une rencontre afin de procéder à la nomination de candidats.

Les militants de la communauté de quelque 600 habitants ont érigé une barricade pacifique pendant quelques heures, barrant la route de terre qui mène à leur territoire, au large de la route 117.

Confronté au barrage, le représentant, qui était accompagné de la Sûreté du Québec, a été forcé de rebrousser chemin, sans même sortir de sa voiture. Il a simplement indiqué aux manifestants que «tout cela relève des Affaires indiennes», a détaillé une autre porte-parole de la communauté, Maylynn Poucachiche, en entrevue téléphonique.

La communauté de Lac Barrière argue depuis le début de ce différend qu'elle a le droit, selon la Constitution canadienne, de conserver son propre système de gouvernance coutumier.

«Le système de mentalité colonialiste du gouvernement c'est de nous assimiler. Et nous ne voulons pas de ça. Nous avons un déjà système et nous voulons le conserver», a martelé M. Wawatie, en entrevue avec La Presse Canadienne.

Car en vertu du système électoral qui serait imposé par le fédéral, les prochains chefs pourraient ne pas résider sur le territoire de la communauté. Le scrutin serait élargi à tout membre inscrit à la liste officielle des membres de la bande, peu importe son lieu de résidence.

Les membres de la communauté du Lac Barrière avaient donc un message très clair à envoyer à Ottawa, jeudi: «Laissez nous nous occuper de nos politiques internes, de nos affaires internes, nous-mêmes, sans votre participation», a résumé M. Wawatie.

La communauté reconnaît néanmoins qu'elle doit rapidement se choisir un nouveau gouvernement pour la représenter, mais aucune date butoir n'a été fixée. Il s'agit d'un «long processus», a plaidé le porte-parole, et la communauté n'a «pas besoin du ministère qui nous dicte comment cela devrait se faire».

La sélection de nouveaux chefs du conseil pourrait donc prendre encore quelques mois, selon M. Wawatie.

Mercredi, lors de son assemblée générale, à Winnipeg, l'Assemblée des Premières Nations a adopté une résolution condamnant la position du ministre des Affaires indiennes, Chuck Strahl, sur les élections imposées dans les communautés autochtones.

Le ministre n'était pas disponible pour commenter la situation à Lac Barrière et les questions de La Presse Canadienne à l'endroit de son ministère sont demeurées sans réponse.

Si la barricade a été démontée, suite au départ du représentant du ministère, Mme Poucachiche a toutefois prévenu que la communauté garderait un oeil sur la route en terre battue, au cas où les autorités fédérales tentent de nouveau d'y entrer.

Puisqu'il s'agit d'une route qui n'assure que la circulation locale, la Sûreté du Québec (SQ) ne rapportait aucune entrave à la circulation dans ce secteur, jeudi matin, outre des travaux de construction qui pourraient nuire au déplacement des véhicules.

Le territoire de Lac Barrière est situé à quelque 150 kilomètres au nord de Mont-Laurier.