Le préposé à l'accueil au camping du Lac Écho, Pierre-Luc Letiecq, a l'air surpris quand on lui dit que les dernières nouvelles placent l'épicentre du tremblement de terre à peu près là où il se tient.

«On est dans l'épicentre?» lance-t-il, les yeux écarquillés.

«C'est ça qu'ils disaient tantôt, à Radio-Canada», répond son collègue, le gardien André Chamberland.

«Ce serait le lac Écho.»

Autour du plan d'eau, en plein centre de la réserve Papineau-Labelle, dans l'Outaouais, c'est maintenant le calme plat, ou presque, près de 5 heures après le séisme d'une magnitude de 5,0 qui a secoué l'ouest du Québec et l'est de l'Ontario.

Avec à peu près juste du bois et des lacs autour, ici, rien n'est brisé.

Les deux hommes étaient possiblement les seuls dans les alentours du lac Écho quand la terre s'est mise à trembler. Les campeurs qu'on entend un peu plus loin, derrière les arbres, n'étaient pas encore arrivés.

Quand ils la racontent, leur histoire ressemble à celle de plusieurs personnes rencontrées dans les villages le long de la route 309, Notre-Dame de la Sallette, Val-des-Bois... «Ça a commencé par un grand boum!»

«Au début, je pensais que c'était un coup de tonnerre. Quand il y a du tonnerre ici, tu l'entends vraiment comme il faut», commence le garde Chamberland.

«Après, je me suis rendu compte que ce n'était pas le tonnerre, c'était un tremblement de terre. Je suis sorti dehors. Et là, tout tremblait. La terre tremblait. Je ne sais pas combien de temps ça a duré...Mais ça a semblé ben, ben, ben long! Le coeur m'allait comme ça...»

M. Letiecq était à quelques mètres, dans le chalet principal. «J'étais en haut dans ma chambre. Je changeais de chemise. Et puis tout à coup, le bruit. Un gros bruit sourd. Dès que ça a commencé, les objets ont tout tombé.»

«Je me suis empressé de descendre les marches et je suis tout de suite sorti dehors. Ça a continué. Le chalet, on l'entendait craquer. Ça a duré un bon 30 secondes avant que les grosses secousses arrêtent. Après ça, c'était le bruit, le bruit. Pendant une minute à peu près.»

«Ça ressemblait un peu à un météorite», dit-il.

Le plus jeune des deux, Jean-Luc Letiecq paraît être celui dont les événements de la journée ont laissé le plus sous le choc.

«Tu regardes ça et tu ne sais pas ce qui va arriver. Est-ce que ça arrête? Est-ce que ça va monter? Est-ce que le sol va craquer? C'est quoi après? Tu ne sais pas!»

Un pont et des bouteilles

Le campement de la Sepaq s'en est malgré tout tiré à meilleur compte que les villages avoisinants, où le séisme a fait un peu plus de dégâts - même si ce mercredi après-midi, ils paraissent plus anecdotiques que nombreux.

À Bowman, debout devant un ponceau de la route 307 affaissé dans le réservoir l'Escalier, le maire de la municipalité se réjouit que les dommages n'aient pas été plus étendus. «Je suis surtout content qu'il n'y ait pas de blessés», soupire Michel David.

«Il y a un homme qui pêchait près du pont et quand c'est arrivé; il a dû recevoir un peu de gravier mais il avait seulement des égratignures», explique-t-il.

Dommages ou non, partout dans les alentours, le tremblement de terre demeure LE sujet de conversation.

Pendant les heures qui suivent, les clients défilent dans le dépanneur Margot, à Notre-Dame-de-la-Sallette, avec chacun avec son histoire à raconter, incluant Margot, la propriétaire.

«Toutes les bouteilles sont tombées! dit-elle. Vous voyez, là, dans le frigidaire, à travers la vitre! Le vin, la bière... Tout par terre!»

Même chose à l'épicerie Richelieu de Val-des-Bois où le caissier, Philippe Ménard, avoue avoir eu un peu peur, surtout après avoir vu le boucher prendre les jambes à son cou aux premières secousses, l'invitant à faire de même.

Quatre heures plus tard, le jeune homme de 18 ans affiche un large sourire.

«On est à Val-des-Bois... Il n'y a rien qui se passe ici! Alors quand ça s'est passé, j'étais là : Oh! Yeah!» dit-il.

«En tout cas, ça va nous mettre sur la map, hein?»

Un ponceau de la route 307 s'est affaissé.