Le premier ministre Stephen Harper a récemment fait face à des attaques quotidiennes des partis d'opposition pour avoir refusé d'enquêter sur les allégations soulevées par le diplomate Richard Colvin au sujet du traitement des prisonniers afghans.

La popularité du premier ministre québécois Jean Charest a quant à elle chuté dans les sondages parce qu'il aurait refusé de déclencher une enquête publique sur la prétendue collusion existant entre les entreprises de la construction, les politiciens et la mafia.Mais certains experts estiment que les enquêtes publiques, hautement politisées, ont résolu davantage de problèmes grâce à la publicité négative qu'elles ont engendrée plutôt qu'en raison des recommandations dont elles ont accouchées.

D'autres argumentent qu'elles salissent des réputations, violent des droits individuels et qu'elles ne valent par les dommages qu'elles créent dans l'opinion qu'a le public des institutions gouvernementales.

L'avocat torontois Clayton Ruby estime que les enquêtes sont efficaces pour démontrer que le gouvernement a mal agi en raison de leur couverture dans les médias, mais que les recommandations faites par ces commissions coûteuses finissent invariablement sur des étagères poussiéreuses.

«Personne ne les écoute», soutient-il, ajoutant qu'elles constituent une véritable perte de temps quant au travail qu'elles sont supposées accomplir.

Me Ruby croit également que les enquêtes publiques représentent souvent, pour les politiciens, un moyen d'enlever rapidement et à court terme «une patate chaude» de la une des journaux. Mais puisque les juges détiennent une autorité indépendante, les politiciens peuvent rapidement perdre le contrôle de la situation.

Le chercheur en sciences politique de l'Université de Montréal, Bruce Hicks, soutient que c'est la raison pour laquelle ni M. Harper ni M. Charest ne veulent d'une enquête publique. Les conclusions d'une telle enquête pourraient faire très mal à leur parti, comme cela a été le cas pour le gouvernement libéral de Paul Martin lors de l'enquête sur le scandale des commandites. «Il y a une peur des enquêtes publiques et pour cause», a ajouté M. Hicks.

De plus, l'avocat Clayton Ruby est en accord avec Jean Charest lorsque celui-ci dit qu'une enquête publique peut miner les efforts de la police. «Si une commission royale dévoile les preuves d'un crime, la police ne peut plus les utiliser dans le cadre de son enquête», a soutenu Me Ruby.

Selon le stratège libéral qui s'est longtemps opposé à la commission Gomery, Warren Kinsella, cette dernière représente un bel exemple d'une commission qui devient hors contrôle. «Elles deviennent trop politique et rendent la population plus cynique devant les institutions démocratiques», a-t-il illustré.

Quant au principal intéressé, le juge à la retraite John Gomery, il admet avoir commis certaines erreurs mais soutient que l'enquête a été un succès et qu'ultimement, elle a menée à des améliorations de l'administration publique.

Il croit que les institutions publiques représentent un outil important qui assure la transparence du gouvernement. «Elles ont été critiquées principalement par des gens qui ont des intérêts et ces derniers sont probablement qu'ils ne veulent pas vraiment que les faits soient dévoilés au grand jour», a ajouté M. Gomery.