«Le rêve, c'est l'imaginaire de l'avenir. C'est se dire : je m'en vais vers un but. C'est très porteur, mais il faut aimer le chemin qui mène à ce rêve.»

Quand il parle de l'importance du rêve, Patrick Lynes, psychologue chargé de cours à l'Université de Sherbrooke, fait de régulièrement des mises en garde. Rêver et caresser des projets, c'est génial, dit-il. À condition toutefois de ne pas occulter tout le reste, et de savoir ajuster les attentes en route.

Il aborde la question dans le livre Le besoin de l'impossible - Impasses collectives et promesses d'avenir. «À mes yeux, le rêve est intéressant si on accepte la réalité, explique-t-il. On vit dans une société où il faut se réaliser là, tout de suite. Je vois beaucoup de personnes, des professionnels surtout, qui se fixent des buts irréalistes ou avec des échéanciers complètement fous. Souvent, le travail qui mène au rêve est, finalement, ce qui est le plus agréable.»

Lorsqu'on lui rapporte les propos du psychologue, Line Caron, vice-présidente dans une entreprise de transport, hoche la tête en répétant: «C'est tellement vrai...»

Au printemps dernier, elle a réalisé un grand rêve. Après deux ans de travail, elle a présenté une comédie musicale avec des femmes sans expérience de plus de 40 ans. Une représentation sérieuse, dans une salle de spectacles, et sous la supervision d'un chorégraphe professionnel.

«Ça faisait tellement longtemps que je voulais faire quelque chose pour moi! raconte-t-elle. J'étais la fille de..., la mère de..., la femme de... Je voulais être Line Caron. J'avais cette idée de faire un spectacle, mais je n'avais aucune expérience ni en chant ni en danse. C'était complètement fou!»

Pour réaliser son rêve, elle a dû diminuer sa charge de travail, faire des recherches, rencontrer une coach de vie, former un groupe de femmes qui «ne chantaient que dans leur douche» et avoir le courage de présenter son projet au chorégraphe Jean-Luke Côté, qui travaille notamment pour l'émission Le match des étoiles.

Jusqu'au jour du spectacle, le groupe a dû s'ajuster. Pendant neuf mois, il a répété au moins une fois par semaine. Toutes les participantes ont aussi suivi des cours de chant chacune de son côté.

La charge de travail et les responsabilités étaient grandes, mais Line a eu le soutien de sa famille. Le soir du spectacle, en saluant la salle comble, Line Caron ne regrettait rien.

«J'ai adoré faire le spectacle, mais je dirais que le voyage vers cette soirée m'a apporté plus que la réalisation de mon rêve, dit-elle. Ça m'a permis d'apprendre que je ne suis pas une deux de pique et que j'ai du leadership! J'ai gagné beaucoup de confiance en moi.»

Réalisme

Dans le sondage Angus Reid mené pour La Presse, 54% des Québécois estiment qu'il est préférable d'être réaliste que de rêver. Plus les répondants sont âgés, plus ils affirment demeurer les deux pieds sur terre.

Malgré leur réalisme, 80% des Québécois affirment avoir réalisé un rêve.

Le rêve est important, nuance Patrick Lynes, mais pour qu'il se réalise, il faut cesser de l'imaginer et agir. D'où l'importance d'une bonne dose de réalisme chez tout rêveur, croit-il.

«Prenons le voyage en exemple: il se peut qu'une fois en pays étranger, la chambre que l'on devait occuper n'est pas libre ou que les bagages soient perdus. C'est la réalité. La personne qui rêve à ce voyage pendant plusieurs années en se disant que ça va être beau et qu'elle va être au paradis, eh bien, elle va être déçue! Il ne faut pas tout attendre d'un rêve.»