La longue route entre Kangiqsujuaq, dans l'Arctique québécois, et Niagara Falls s'est allongée un peu plus hier pour la famille de David Qumaaluk. «Ce matin, dans le taxi, j'ai appris qu'il y avait un problème, une grève», a raconté M. Qumaaluk, rencontré sur le trottoir devant la Gare centrale de Montréal.

Comme des milliers d'autres passagers affectés par la grève déclenchée hier midi par les 340 membres du syndicat des mécaniciens de locomotive de VIA Rail, M. Qumaaluk a pris un autobus au lieu d'un train. Cela signifiait une heure de retard au départ et encore plus sur le trajet vers sa destination.

Tous les trains qui devaient partir avant le déclenchement de la grève à midi ont été remplacés par des autocars ou, dans certains cas, par des avions. Les détenteurs de billets pour des trains devant partir après midi hier peuvent obtenir un remboursement.

Le conflit porte principalement sur les horaires de travail, a affirmé Stéphane Lacroix, porte-parole de la Conférence ferroviaire de Teamsters. «Les passagers subissent une situation fort désagréable et nous le regrettons, mais après deux ans et demi de négociations, il fallait tracer la ligne», a-t-il dit.

Il a ajouté hier que «les négociations sont rompues», mais de son côté, une porte-parole de VIA Rail, Claude Arsenault, a affirmé que «les deux parties sont avec le médiateur».

«À cette période-ci de l'année, VIA Rail déplace 12 000 personnes par jour, a dit Mme Arsenault. Les trains qui ont pu partir au cours des derniers jours étaient complets.»

Cette grève est une nouvelle tuile qui s'abat sur l'industrie du tourisme, après la crise financière, l'exigence du passeport à la frontière américaine, l'envolée du huard et le mauvais temps.

Avant la question des salaires, c'est celle des horaires de travail qui a fait achopper les négociations intensives qui duraient depuis lundi, a affirmé M. Lacroix. «Actuellement, les équipages n'ont jamais deux jours de congé consécutifs. C'est quelque chose qui dure depuis plusieurs décennies. Alors que, de nos jours, c'est la norme d'avoir deux jours de congé consécutifs dans une semaine de travail.»

Il a ajouté que les demandes salariales «sont très raisonnables compte tenu du contexte économique».

Les clients de VIA Rail se sont rués vers les compagnies d'autocars et les agences de location de voitures hier. De son côté, une compagnie aérienne leur offrait pendant trois jours un rabais de 25%.

«Depuis ce matin (hier), on a commencé à sentir plus d'achalandage, a dit Denise Sirois, porte-parole de la compagnie d'autocars Orléans Express. On avait prévu des conducteurs et des autocars additionnels spécialement aux heures où il devait y avoir des départs de trains.»

Plusieurs agences de location d'autos jointes par La Presse hier affichaient complet.

L'association Transport 2000 Québec a déploré hier le déclenchement du conflit et a demandé l'intervention des ministres fédéraux du Transport et du Travail. L'association craint «les répercussions d'une telle grève sur la confiance du public envers le transport ferroviaire dans une période où les investissements viennent à peine d'être relancés».

La famille Qumaaluk souhaitait elle aussi une issue rapide au conflit, avant la fin de leur séjour de six jours à Niagara Falls. «J'espère revenir en train, c'est plus rapide et plus confortable», a dit M. Qumaaluk, qui faisait son premier voyage familial dans le «Sud» en compagnie de sa fille Lourisa, 7 ans, de son fils Yaasuki, 4 ans, et de sa conjointe Elisapie.