Plus du tiers des Québécois «issus de la diversité culturelle» estiment qu'ils sont sous-représentés à la télévision. Certains considèrent qu'ils sont décrits de façon négative, d'autres de façon stéréotypée.

C'est ce qui ressort d'un sondage Léger Marketing réalisé auprès de 2030 personnes, à la demande du Conseil des relations interculturelles. Environ la moitié des répondants sont des Québécois de souche et l'autre moitié représente des immigrants de première, deuxième ou troisième génération.

«La télévision est censée être le miroir de la société. Quand on ne se voit pas, c'est comme si on n'existait pas», lance Patricia Rimok, présidente du Conseil des relations interculturelles. Il faut reconnaître la transformation de notre tissu social.»

Le sondage révèle que 17% des Québécois issus des communautés culturelles trouvent que leur traitement médiatique est inadéquat à la télévision. Ils sont moins nombreux à reprocher aux journaux de ne pas assez parler d'eux (13%, contre 36% pour la télévision), mais ils sont néanmoins 15% à penser que leur image n'est pas fidèle à la réalité dans les quotidiens.

Près de 6 répondants sur 10 sont par ailleurs d'accord avec l'idée que «les journalistes issus de communautés culturelles sont habituellement nés au Québec, et qu'ils ont l'accent québécois». «C'est surprenant. Il y a 20 ans, il y avait tout un mouvement avec la Fédération professionnelle des journalistes du Québec pour mettre des mesures. Bien, 20 ans plus tard, on se retrouve avec le même constat», rappelle Fo Niemi, directeur général du Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR).

Les télédiffuseurs mettent surtout à l'écran des «enfants de la loi 101», souligne Fo Niemi. Je crois que les gens veulent voir la diversité, mais à la québécoise. Cela remet en question ce que l'on veut dire par diversité et différence.»

Depuis 20 ans, les nouveaux immigrants sont moins «caucasiens» et plus «colorés». Ils ne viennent pas majoritairement de l'Europe, mais plutôt de l'Afrique, de l'Asie et des Antilles. Le sondage révèle justement que plus une personne est d'immigration récente et que plus sa minorité est «visible», plus elle se considère mal représentée dans les médias.

Rachad Antonius, professeur de sociologie à l'UQAM et directeur adjoint de la chaire de recherche en immigration, ethnicité et citoyenneté, n'est pas étonné des résultats du sondage. «Regarder la télévision et prendre le métro, ce sont deux mondes différents», illustre-t-il.

Pourquoi pas une série télévisée qui serait une version 2009 de Ces enfants d'ailleurs, avec une famille musulmane en vedette? C'est l'idée que le sociologue lance, faisant référence à la minisérie réalisée d'après le roman d'Arlette Cousture, qui racontait la vie d'immigrants polonais.

«Si on va voir occasionnellement une famille musulmane pour parler du ramadan, ce n'est pas du quotidien», plaide-t-il.

Avec tous les constats du sondage - mené dans l'année suivant la commission Bouchard-Taylor et les émeutes de Montréal-Nord -, Mme Rimok espère pouvoir en discuter avec les associations et les propriétaires de médias. Car ultimement, la sous-représentation des communautés culturelles créera «des tensions sociales», craint-elle.

Le sondage a été réalisé auprès de 2030 Québécois, dont 1004 issus de la diversité culturelle. Du 13 au 25 février derniers, les participants ont été invités à remplir le questionnaire sur un site web sécurité de Léger Marketing. Selon les groupes de répondants, les marges d'erreur vont de 2,18% à 3,09%.