Environ 25 000 personnes, responsables de garde en milieu familial et ressources intermédiaires en services sociaux, auront le droit de se syndiquer à la faveur de deux projets de loi déposés hier à l'Assemblée nationale.

Ministre de la Famille, Tony Tomassi a souligné du même souffle que le dépôt du projet de loi met fin à la possibilité pour ces employées - en très grande majorité des femmes - de déposer des plaintes à la Commission des normes du travail. À la faveur d'une campagne syndicale, pas moins de 1500 plaintes avaient été déposées en vertu des normes minimales après que le gouvernement eut annoncé, en campagne électorale, qu'il n'interjetait pas appel du verdict de la Cour supérieure, fin octobre. La juge Danièle Grenier y affirmait la liberté d'association de ces travailleuses autonomes.

 

Parce que les dispositions touchent aussi les travailleuses en milieu familial pour le réseau des affaires sociales - on en trouve environ 10 000 -, la ministre déléguée aux Services sociaux, Lise Thériault, a déposé un projet de loi similaire hier.

Le ministre Tomassi a refusé d'évaluer les conséquences de la syndicalisation de ces travailleurs sur les finances publiques - en cour les procureurs de Québec avaient parlé d'un milliard de dépenses supplémentaires.

Pour la ministre Thériault, grâce à ces projets de loi, «le gouvernement va pouvoir conclure des ententes collectives avec une association de ressources reconnues». Pour les garderies en milieu familial, ces femmes qui s'occupent d'environ 91 000 enfants auront aussi accès aux avantages fiscaux offerts aux travailleurs autonomes.

L'initiative de Québec a suscité des réactions diverses. Pour la CSQ qui, depuis 12 ans, revendique la liberté d'association pour ces travailleurs, il s'agit «d'une avancée importante», a expliqué la vice-présidente, Louise Chabot.

La centrale a discuté depuis quelques mois avec le Conseil du Trésor. «Les droits d'association et de négociation sont reconnus pleinement dans le projet de loi», salue Mme Chabot. Elle juge toutefois difficile de concilier le fait que Québec reconnaisse tout à la fois le statut de travailleur autonome et le droit à l'association. «Après toutes ces années, ces personnes peuvent dire enfin on a accès à des droits», résume la syndicaliste.

La facture de 1 milliard pour Québec, «c'est le chiffre qui a circulé», on doit aussi tenir compte du retrait préventif pour les employées enceintes, des bénéfices de la loi sur les normes du travail pour les congés et les jours de maladie. Pour les accidents de travail, ces travailleuses autonomes n'avaient qu'une protection théorique, compte tenu de leurs faibles revenus - autour de 15 000$ par année. Ces employées étaient déjà couvertes au chapitre des congés parentaux.

L'intention de Québec n'a pas plu toutefois du côté patronal. L'Association québécoise des centres de la petite enfance - environ 800 garderies et bureaux coordonnateurs - estime que le ministre Tomassi chambarde les structures sous le couvert de la reconnaissance du droit à l'association. «On salue le fait que les responsables de garde obtiennent des conditions équitables», de souligner d'abord Johanne Roy, la présidente de l'association.

Mais, s'empresse-t-elle d'ajouter, le projet de loi prévoit aussi «un brassage de structures». On sépare les centres de la petite enfance des bureaux coordonnateurs. «Cela va coûter plus cher, et il n'y aura pas une place de plus», déplore Mme Roy, soulignant que les employeurs n'avaient jamais été consultés sur ce projet de loi.