Le succès de l'opération de déneigement à Montréal se joue en partie sur un étroit terrain balayé par le vent le long de l'autoroute 20, dans Saint-Henri.

Normalement, trois trappes permettent aux camions d'y déverser leur chargement dans un égout collecteur. Mais pas en ce vendredi matin.

 

«Il fait trop froid, explique Louis Lapointe, chef de division aux travaux publics de l'arrondissement du Sud-Ouest. Quand l'eau atteint moins de 4°, l'usine d'épuration nous demande d'arrêter. Sinon, l'équipement peut être endommagé.»

L'interruption a touché six arrondissements. «Il y a eu interruption du déchargement à l'égout entre 6h et 10h à cause d'un blocage, dit Valérie De Gagné, de la Ville de Montréal. Cela arrive quand il fait froid et que le débit dans les égouts est insuffisant.» Malgré cela, dit-elle, le déneigement se terminera tout de même au début de la semaine prochaine.

Comme ils ne pouvaient plus déverser leur chargement dans l'égout, hier matin, les quelque 60 camions qui travaillent à l'enlèvement de la neige dans l'arrondissement du Sud-Ouest ont tous été envoyés au dépôt à neige de l'avenue Irwin.

Le quart d'entre eux y faisaient la file vers 8h - autant de camions qui ne sont pas aux côtés de l'une des cinq souffleuses déployées dans les rues des quartiers Émard, Pointe-Saint-Charles, Saint-Henri et Petite-Bourgogne.

Sur le vaste terrain, une souffleuse géante travaille sans relâche pour maximiser l'espace. La machine, haute de 3 m, est fixée à une chargeuse-pelleteuse. Son jet projette la neige jusqu'à une hauteur équivalente à un immeuble de 10 étages. «C'est le type de souffleuse qu'il y a dans les aéroports», dit M. Lapointe.

Les camions s'alignent côte à côte pour décharger et repartent dans les rues. Le terrain de l'avenue Irwin peut accueillir l'équivalent de 10 000 voyages de camion. Il est déjà à moitié plein. «Il y aura encore de la neige ici en septembre prochain», dit M. Lapointe.

L'hiver dernier, qui a vu tomber un record de 505 cm de neige à Montréal, le dépôt était plein aux Fêtes, ce qui a forcé l'ouverture d'un dépôt d'urgence dans l'ancienne gare de triage Turcot. Selon M. Lapointe, des négociations sont déjà en cours pour répéter cette mesure exceptionnelle cette année.

Rue Galt, deux automobilistes sont emprisonnés derrière un banc de neige. Ils attendent le passage de la souffleuse, elle-même retardée par le manque de camions.

Quelques minutes d'attente qui n'importunent pas Marie-Claude, agente en environnement pour Transports Canada. «Je vais être en retard, mais ce n'est pas grave, dit-elle. Au moins, on est dans les premiers à être déneigés. Et on est chanceux d'avoir de la neige. Un jour, avec les changements climatiques, on va peut-être en parler au passé!»

Garée derrière elle, Karim est plus impatient. «Je suis enseignant, alors mes élèves vont m'attendre», dit-il.