Ottawa doit hausser le ton à l'égard de l'Arabie Saoudite, affirme l'opposition, qui presse le gouvernement d'accentuer ses efforts pour empêcher l'exécution de deux jeunes Montréalais condamnés pour meurtre.

«Je m'attends à ce que le ministre Lawrence Cannon lui-même se présente en Arabie Saoudite», a déclaré le député Dan McTeague, critique libéral en matière d'affaires consulaires.

 

Le ministère des Affaires étrangères confirme que le secrétaire parlementaire du ministre Cannon, Deepak Obhrai, s'est rendu en Arabie Saoudite pendant trois jours, juste avant Noël. Il a rencontré des fonctionnaires du royaume wahhabite afin de discuter du sort des frères Mohamed et Sultan Kohail.

Mohamed, 23 ans, est emprisonné depuis 2007. Il a été arrêté dans la foulée d'une bagarre de cour d'école qui s'est soldée par la mort d'une jeune Syrien, Munzer Haraki. Au terme de son procès, il a été condamné à mort par décapitation. Son dernier appel a été rejeté par les tribunaux le mois dernier.

Impliqué dans la même affaire, Sultan, 17 ans, a été condamné à un an d'emprisonnement et à 200 coups de fouet. Il risque toutefois la peine de mort lui aussi, car il subira un nouveau procès devant le tribunal qui a jugé son frère.

Les deux jeunes hommes, d'origine palestinienne, ont vécu six ans à Montréal avant que leur famille s'installe en Arabie Saoudite. Tous deux sont citoyens canadiens.

Ottawa a fait part de ses «préoccupations» au gouvernement saoudien au cours des dernières semaines, et le ministre Lawrence Cannon a promis à la fin du mois de novembre d'accentuer les efforts diplomatiques pour empêcher la mise à mort des deux frères.

Mais ces efforts sont insuffisants, dénonce le député Dan McTeague. «Comment peut-on penser que les Saoudiens prendront la situation au sérieux si le gouvernement du Canada ne prend pas la question au sérieux?»

Sultan Kohail a comparu devant un tribunal mardi et n'y reviendra pas avant deux ou trois mois. Les choses sont plus pressantes dans le cas de Mohamed, prévient le député, car le jeune homme a pratiquement épuisé tous ses recours judiciaires. Seule l'intervention du roi Abdallah pourra le sauver si le Conseil suprême maintient la sentence.

Voilà pourquoi le ministre Lawrence Cannon doit à tout prix se rendre en Arabie Saoudite, dit Dan McTeague. «Ça témoignerait, aux niveaux les plus élevés, de l'intérêt que nous portons à ce cas», explique-t-il.

Au Ministère, on affirme que M. Cannon s'occupe déjà personnellement de l'affaire. «Le ministre Cannon a soulevé l'affaire Kohail lors d'un appel téléphonique avec son homologue saoudien au début décembre, a indiqué la porte-parole Lisa Monette dans un courriel. Suivant les instructions du ministre, des fonctionnaires du département des Affaires étrangères ont rencontré le chargé d'affaires saoudien à Ottawa et notre ambassade à Riyad a envoyé une note diplomatique aux autorités saoudiennes.»

La famille Kohail clame depuis le début du procès que les deux frères fils ont agi par légitime défense. Un ami montréalais, qui agit à titre de porte-parole, a confié que les proches de Mohamed et Sultan vivent de durs moments.

«C'est une période très agitée pour eux en ce moment, a indiqué Mahmoud Al-Ken. Ils ne sont pas très optimistes.»

Ces tractations surviennent alors que deux Saoudiens condamnés pour le viol d'un homme ont été décapités au sabre, hier. Ces décapitations portent à 100 le nombre d'exécutions annoncées cette année par les autorités saoudiennes.