L'opposition officielle au conseil municipal de Montréal, Projet Montréal, a accusé hier la Société de transport de Montréal (STM) d'avoir réduit les services sur 47 de ses 221 lignes de bus, soit 21 % de tous ses circuits, depuis le début de cette année. La STM rétorque de son côté qu'elle prévoit, en fait, ajouter quelque 100 000 heures de services sur ce réseau en 2017. Qui a raison ? Qui a tort ? Un peu les deux. Tout est dans la façon de compter.

QUE DIT PROJET MONTRÉAL ?

La chef de Projet Montréal, Valérie Plante, a reproché hier au maire de Montréal Denis Coderre « d'accepter des réductions de service sur autant de lignes d'autobus » au moment où la métropole suffoque sous la congestion causée par le trafic automobile. « Il devrait plutôt être proactif en investissant massivement dans les services, au lieu de les couper. » Pour l'opposition, les dizaines de départs retranchés sur certaines lignes de bus ont des impacts majeurs « sur des Montréalais qui ont besoin de services de transport efficaces pour aller travailler ». Parmi les pires cas cités, la STM a retranché 93 départs par semaine (13 par jour en moyenne) sur la ligne 106 du boulevard Newman, dans le sud-ouest, secteur enclavé par le chantier de l'échangeur Turcot. La ligne 41, qui dessert le quartier de Saint-Michel, dans le nord-est, offre en ce moment 85 départs de moins (12 par jour) qu'à la fin de 2016.

COMMENT ARRIVE-T-ON À CE CONSTAT ?

À partir des données d'une application pour téléphone mobile, Transit App, Projet Montréal a comparé le nombre des départs sur des circuits de la STM à la fin de 2016 avec ceux offerts sur les mêmes lignes depuis le début de 2017. Le conseiller municipal de Projet Montréal, Sylvain Ouellet, reconnaît que d'autres circuits de bus bénéficient d'ajouts de service, notamment les routes de nuit et certaines lignes qui débordent, comme la 24 sur la rue Sherbrooke. « L'ajout d'heures de service est là », dit-il, mais dans des secteurs comme Saint-Michel, « les coupures touchent toutes les lignes ». Il estime que si la STM avait suivi les plans de service annoncés dans le plan stratégique de 2010, il y aurait 200 autobus de plus qui rouleraient dans l'île de Montréal et il ne serait pas nécessaire de réduire le nombre des départs sur 47 lignes pour améliorer les services sur d'autres. « On a déshabillé Pierre pour habiller Paul », déplore-t-il.

QU'EN DIT LA STM ?

Sans confirmer de nombres précis, le président de la STM, Philippe Schnobb, reconnaît qu'il y a moins de départs sur plusieurs circuits de bus en ce début d'année. Mais il affirme que « pour chaque ligne où il y a moins de départs, il y a une ligne où il y en a plus ». Il refuse de parler de réduction de service et parle plutôt d'« ajustements » d'horaires, en fonction de la clientèle présente sur chaque ligne. La STM, dit-il, fait ce type d'ajustements quatre fois par année, et dans la très grande majorité des cas, « on parle d'un ou deux autobus de moins par ligne ». Selon lui, pour être valides, les comparaisons de Projet Montréal auraient dû porter sur les mêmes périodes (de janvier à mars, par exemple) en 2016 et 2017, plutôt que de comparer une offre de service de fin d'année à celle du début de l'année suivante. « Le fin mot de l'histoire, en définitive, c'est que nous ne diminuerons pas les services sur le réseau de bus. Nous allons les augmenter de 100 000 heures sur l'ensemble de l'année. »

UN EXEMPLE ?

Prenons le cas de la ligne 747 de la STM. Selon les données de Projet Montréal, c'est sur cette ligne que les coupes seraient les plus sévères : 195 départs de moins par semaine, soit 28 départs en moyenne, chaque jour, entre le centre-ville de Montréal et l'aéroport international de Dorval. Or, affirme M. Schnobb, la fréquence de cette ligne particulière est planifiée en fonction des arrivées et des départs prévus à l'aéroport, qui peuvent fluctuer de façon importante en cours d'année. Ainsi, s'il y a moins d'activités à l'aéroport de Dorval en janvier qu'en novembre et décembre, il est normal de réduire le nombre des départs de bus pour l'aéroport. 

ALORS, EST-CE QUE LES SERVICES AUGMENTENT OU DIMINUENT ?

Ils augmentent... après avoir été sévèrement diminués. En 2013, les autobus de la STM ont roulé un total de 89,7 millions de kilomètres. À la fin de cette année-là, Denis Coderre a été élu maire de Montréal et a nommé M. Schnobb à la présidence de la STM. Et en 2014, première année des mandats de MM. Coderre et Schnobb, les autobus de la STM ont roulé 4,4 millions de kilomètres de moins que l'année précédente. Une baisse de 5 % des services. Suivie, en 2015, par une autre baisse de 2 % des kilomètres parcourus. En deux ans, sous l'administration Coderre-Schnobb, le parc d'autobus de la STM a parcouru un total de 6,2 millions de kilomètres de moins qu'en 2013. Même avec les 100 000 heures de services additionnelles promises pour 2017, les autobus de la STM rouleront cette année un total de 85,4 millions de kilomètres, en net recul (4,8 %) par rapport aux services assurés avant l'élection de 2013.