L'ancien président du syndicat des cols bleus de Montréal Michel Parent estime qu'il a été victime d'un putsch mené par la «clique» de son prédécesseur Jean Lapierre, qui garde un ascendant puissant sur le local 301.

«Il a quitté à la retraite en 2003, mais il est toujours resté omniprésent pour essayer de contrôler les décisions de l'exécutif», a raconté M. Parent lors d'une entrevue avec La Presse.

Officiellement à la retraite depuis hier, M. Parent est sorti de son mutisme pour la première fois depuis son départ. Il a voulu réagir à une déclaration de la nouvelle présidente du syndicat, Chantal Racette, malgré une entente de confidentialité entourant les circonstances du départ de M. Parent. Au micro de Paul Arcand, lundi, elle a affirmé que Michel Parent avait quitté la tête du syndicat de son propre gré.

«C'est faux. Ils ne mettront pas ma crédibilité en doute. J'ai travaillé trop longtemps dans ce syndicat-là pour permettre de me dénigrer de la sorte», a indiqué M. Parent, qui a été à la tête du puissant syndicat des employés manuels de la Ville pendant 12 ans.

Selon sa version des faits, il a été poussé à la porte en mars, quelques semaines avant la fin de son mandat, car l'ancien vice-président Gaétan Simard, qui venait d'être remplacé après un scrutin, ne voulait pas retourner à ses fonctions de col bleu. Même chose pour l'ancien trésorier Daniel Gaucher.

Michel Parent raconte que le frère de Jean Lapierre, André Lapierre, a ensuite déposé une plainte contre lui, car il n'avait pas participé à suffisamment de réunions de la fondation du syndicat des cols bleus.

«C'était un moyen de m'écarter avant les élections afin que la présidente soit élue et, une fois élue, qu'elle puisse confirmer la nomination de Simard et Gaucher comme ses deux conseillers.»

Plus Jean Lapierre «place ses pions», plus il a de contrôle, résume M. Parent.

Après 23 ans passés au syndicat, trouve-t-il difficile la manière dont se sont terminées les choses?

«C'est sûr que je suis amer, mais écoute, ça m'a permis une chose: de connaître la nature humaine. Les hauts dirigeants qui sont libérés ont un salaire. Il y en a que pour ce surplus de salaire-là, ils aiment mieux être au syndicat et faire n'importe quoi qu'être dans leurs fonctions de col bleu. Comme si c'était honteux ou dégradant. Ces gens-là oublient leurs origines.»

Michel Parent souligne que Jean Lapierre, qui a été président du syndicat de 1985 à 2003, est encore vu comme une icône au sein du syndicat. Il tient à souligner qu'il a fait beaucoup pour les employés cols bleus.

Lorsqu'elle s'est présentée aux élections pour devenir présidente du syndicat des cols bleus, Chantal Racette avait fait parvenir une lettre à ses membres pour leur indiquer qu'elle prônait le retour «à un rapport de force comme à l'époque de Jean Lapierre». Lors d'une assemblée générale extraordinaire, qui a réuni des centaines de cols bleus en arrêt de travail illégal la semaine dernière, M. Lapierre a été le premier à prendre le micro, et il a fait l'éloge des «bonnes vieilles méthodes».

Mme Racette est-elle la marionnette de Jean Lapierre? «Je suis convaincu qu'il lui donne des conseils très judicieux. Et vu que c'est son mentor, tel qu'elle l'a dit, elle va le suivre les deux yeux fermés», croit Michel Parent.

Sur le fond, il appuie les revendications du syndicat des cols bleus. Il est farouchement contre le pacte fiscal, qui pourrait donner aux villes le pouvoir de décréter les conditions de travail de ses employés.

«Je peux vous garantir une affaire: s'il n'y a pas de règlement des conventions collectives dûment négociées, et que le pacte fiscal est adopté tel quel, je ne suis pas sûr que les fêtes du 375e vont être belles à voir.»

Depuis une semaine, nous avons effectué une quinzaine de demandes auprès du porte-parole du syndicat des cols bleus, André Lepage, pour obtenir une entrevue avec la présidente Chantal Racette ou pour obtenir différentes informations factuelles. Nous avons également demandé une entrevue avec MM. Gaucher et Simard. Toutes nos demandes sont restées sans réponse.