Le Plateau Mont-Royal en a assez de voir des locaux rester vacants des années durant, leurs vitrines souvent placardées et couvertes de graffitis. Afin d'inciter les propriétaires à les louer plus rapidement, le maire de l'arrondissement, Luc Ferrandez, compte imposer une taxe spéciale sur ces espaces inoccupés pour éviter que ces bâtiments laissés à l'abandon ne nuisent aux artères commerciales.

Dans sa lutte contre les locaux laissés vacants, le Plateau a d'abord voulu imiter la Ville de Chicago, qui impose des permis aux propriétaires de locaux vacants. «On voulait que les propriétaires aient à payer un permis de local vacant, permis qui aurait coûté de plus en plus cher, plus le local est vide longtemps. Mais au Québec, ce n'est pas possible de le faire avec la Loi sur l'aménagement du territoire», se désole Luc Ferrandez. Les administrations municipales peuvent uniquement imposer des permis en fonction des usages des bâtiments, et non pas de l'absence d'occupation.

Changeant de stratégie, le Plateau est donc retourné à la planche à dessin. Plutôt que se tourner au sud de la frontière à la recherche de solutions, l'arrondissement a décidé de s'inspirer de ce qui se fait déjà à Montréal. La métropole impose en effet depuis quelques années une taxe spéciale sur les stationnements. Afin d'encourager la construction sur les rares terrains encore libres au centre-ville, la métropole impose en effet une facture de trois à six fois supérieure aux stationnements extérieurs qu'aux stationnements intérieurs. La zone touchée par cette taxe spéciale se trouve entre les avenues Atwater et Papineau, au sud de l'avenue des Pins.

En imitant cette stratégie pour les locaux vacants, Luc Ferrandez espère arriver à réduire le nombre de locaux vacants pendant des années. Avec leurs vitrines souvent placardées et couvertes de graffitis, ces bâtiments rendent les artères commerciales moins attrayantes. Or, en recevant une note de plus en plus lourde chaque année avec cette taxe spéciale, le maire d'arrondissement espère inciter les propriétaires à trouver un ou des locataires, contribuant du coup au dynamisme des artères commerciales.

Reste maintenant à savoir à combien se chiffrera la taxe spéciale. Le taux d'imposition des commerces est déjà quatre fois plus élevé que pour les immeubles résidentiels à Montréal. Une résidence du Plateau évaluée à 500 000$ a ainsi reçu une facture de 4400$ en 2015 contre près de 19 000$ pour un édifice commercial de valeur égale.

Inspections sur Saint-Laurent

D'ici à ce que la taxe spéciale entre en vigueur, le Plateau a entre-temps décidé d'accentuer la pression sur les propriétaires de locaux vacants du boulevard Saint-Laurent en multipliant les inspections. «Depuis le début de l'été, on cible les locaux vacants. On vérifie si les ordures sont sorties le bon jour, s'il y a des problèmes de saleté. On s'assure que le local est bien fermé en tout temps. Toute infraction à la réglementation mène à une contravention. En augmentant notre vigilance, on veut envoyer le message de ne pas garder les locaux vacants parce que ça va coûter cher», résume Luc Ferrandez.

Déjà, le Plateau dit être l'arrondissement distribuant le plus d'amendes pour des problèmes de propreté. «On donne 2000 contraventions par année. C'est quatre fois plus que le deuxième arrondissement à en distribuer le plus», dit Luc Ferrandez.

La Société de développement commercial du boulevard Saint-Laurent voit d'un bon oeil la décision de l'arrondissement de multiplier les amendes aux propriétaires laissant leur façade en mauvais état. «Il y a des propriétaires qui ne sont pas à Montréal et ils ne se déplacent pas pour voir l'état de leur bâtiment. Au moins, avec une contravention que tu reçois à ton adresse, ça peut te donner la motivation d'aller constater par toi-même le problème», dit Tasha Morizio, directrice générale de l'association des commerçants. Son organisation multiplie les initiatives depuis plusieurs années pour animer la Main, notamment avec la création du festival MURAL et une corvée pour améliorer l'apparence de l'artère.