Le maire Denis Coderre assure que l'embauche de son ami et codirecteur de campagne par l'industrie du plastique ne le fera pas plier dans son projet de bannir des commerces de Montréal les sacs à usage unique. Projet Montréal y voit toutefois un conflit d'intérêts.

La Presse a révélé ce matin que Pierre Bélanger a inscrit au Registre des lobbyistes un mandat rémunéré «de 50 000 à 100 000$» pour le compte de l'Association canadienne de l'industrie des plastiques (ACIP). Il y indique vouloir convaincre le maire et ses conseillers de revenir sur leur décision d'interdire les sacs.

Questionné sur l'impact de l'embauche de son «ami de 20 ans» sur son projet, le maire s'est montré tranchant. «En anglais, ils disent "irrélevant"», a lancé le maire.

Denis Coderre a refusé de voir dans l'embauche de l'un de ses proches collaborateurs un conflit potentiel. «Laissons la place au débat. Ce n'est pas juste une affaire de lobbyistes ou d'environnementalistes. C'est une question de population.»

L'opposition à l'hôtel de ville n'est pas du tout du même avis. «Pierre Bélanger et le maire se sont mis dans situation de conflit d'intérêt, estime Alex Norris, élu de Projet Montréal. Il est vrai que la loi n'interdit pas au lieutenant de campagne de devenir lobbyiste après l'élection, cependant, il est clair qu'un maire va se sentir redevable envers son ami qui a tant contribué à son élection et il risque d'avoir une attitude différente que devant un autre lobbyiste.»

Projet Montréal estime qu'il s'agit là d'une brèche dans la loi que l'Assemblée nationale devrait s'empresser colmater. «En attendant, il incombe à Pierre Bélanger de réfléchir à la situation et de se retirer du mandat», poursuit Alex Norris. L'élu d'opposition ajoute que ce n'est pas le premier mandat de lobbyiste problématique de Pierre Bélanger, celui-ci ayant accepté de représenter l'entreprise 8D Technologies, qui poursuit Bixi.

Le maire a toutefois jugé que c'est La Presse qui a erré en publiant un article sur le mandat de lobbyiste de son ami. «Va falloir qu'on m'explique cet article insinuait quoi. C'est un coup d'épée dans l'eau. C'est moi qui ai lancé le débat.»

Reste que les pressions de l'industrie du plastique ont déjà réussi par le passé à faire tomber des projets de règlements pour interdire les sacs à usage unique. La ville de Toronto a abandonné l'idée en 2013 au terme d'un long débat. Un regroupement de fabricants américains a réussi à faire suspendre jusqu'en novembre 2016 une loi en Californie interdisant les sacs de plastique. La question sera alors tranchée lors d'un référendum.

Quant à la consultation publique annoncée ce matin à Montréal, le maire s'est dit ferme dans son objectif d'éliminer le million de sacs de plastique se retrouvant dans les dépotoirs de Montréal. Malgré son intention de les bannir, Denis Coderre a assuré «ne pas être dogmatique» et être ouvert à «des mesures de transition». Il a toutefois émis des réserves ce matin sur l'efficacité des sacs biodégradables.