Aussi appelé rat brun, surmulot ou rat norvégien, le rattus norvegicus est l'espèce qui domine dans les égouts montréalais. Plus gros, plus robuste, il a pratiquement supplanté son cousin le rat noir (ou rattus rattus) des zones tempérées.

«On a déjà vu quelques rattus rattus dans le port de Montréal, mais ils n'arrivent pas à s'implanter à Montréal: ils sont aussitôt traqués et tués par les rattus norvegicus», explique Harold Leavey. Le rat norvégien est extrêmement prolifique: une femelle peut donner naissance à une soixantaine de petits chaque année, qui atteindront leur maturité sexuelle en moins de six semaines. Dans les faits, pourtant, la population des rats est relativement stable dans un environnement qui n'évolue pas: c'est que leur société est très hiérarchisée et leur sens du territoire extrêmement féroce.

Ils se divisent en groupes d'environ une cinquantaine de membres répartis en trois classes sociales. Le rat «alpha», plus gros, mange en premier et dispose des meilleures femelles. Les rats «bêta» sont au service de l'alpha, vont parfois le défier et forment une sorte de classe moyenne. L'«oméga» est au service des autres. Tant qu'il n'y a pas de surpopulation, l'équilibre et une paix relative se maintiennent. Si trop de rats partagent le même espace, la structure sociale s'effondre, «le cannibalisme, le viol et l'homosexualité font leur apparition», rapporte M. Leavey, qui a contribué au célèbre documentaire Ratopolis, lancé en 1973.

Les rats passent l'essentiel de leur vie dans les égouts, où ils y trouvent de la nourriture et un abri. Les femelles vont cependant être à la recherche d'endroits plus propres et plus chauds quand elles sont sur le point de mettre bas: c'est là qu'on les retrouvera notamment dans les maisons. Leur odorat fin leur permet également de repérer les autres sources de nourriture à l'extérieur des égouts - essentiellement les ordures ménagères. Une tâche facilitée par les bris et les travaux sur le réseau.