Un travailleur qui a passé quatre heures et demie enseveli sous la terre est mort, tandis que son patron a été grièvement blessé en tentant de le sauver, mardi à Lachine.

Vers 12h10, Sylvain Fournier, 43 ans, et son employé de longue date Gilles Lévesque, dans la cinquantaine, s'affairaient à sécuriser une tranchée qu'ils venaient de creuser sur le terrain d'une résidence de la 54e Avenue, en prévision de travaux de conduite d'eau.

La paroi de la tranchée se serait soudainement effondrée sur M. Lévesque. Sylvain Fournier, qui était aux commandes d'une pelleteuse, a sauté dans le trou pour tenter de secourir son ami.

Ce faisant, il a causé un second affaissement qui l'a coincé à son tour.

Olivier Morissette, un voisin, s'est approché de la tranchée, où il a vu M. Fournier enseveli jusqu'à la taille sous de la terre et un gros bloc d'asphalte.

«Quelqu'un a essayé d'enlever le bloc à l'aide d'une pelleteuse. L'homme était conscient, mais pas fort. À ce moment, je ne savais pas qu'il y en avait un deuxième complètement enseveli», raconte-t-il.

Appel téléphonique

André Desjardins, ami de M. Fournier, l'a appelé sur son téléphone portable vers 12h20.

«Il m'a répondu et m'a dit qu'il était coincé dans un trou. Je l'entendais crier à l'aide», raconte-t-il. Il a appelé tous leurs amis communs et s'est rendu à Lachine. Rapidement, proches, amis et collègues des victimes se sont rendus sur les lieux, ce qui a entraîné des moments de tension insoutenables.

Quant à l'ami qui aurait tenté, à l'aide de la pelleteuse, de retirer le bloc d'asphalte sous lequel on présumait que se trouvait M. Lévesque, il a dû cesser ses manoeuvres à l'arrivée des pompiers.

«Ce gars-là aurait pu enlever la pièce d'asphalte et peut-être lui sauver la vie. Ces gars-là peuvent ramasser un dollar par terre avec une pépine», a déploré M. Desjardins.

«On ne pouvait prendre le risque qu'il cause un troisième affaissement avec la pelleteuse, et que les pompiers se transforment eux aussi en victimes», a indiqué le chef aux opérations des pompiers, André Paquette.

Il aura donc fallu une bonne heure et demie aux spécialistes des sauvetages en espaces clos pour sécuriser les abords de la tranchée à l'aide de pieux et de madriers. Ils ont ensuite pu en extirper Sylvain Fournier, qui était toujours conscient.

«Il a les jambes cassées, a précisé son frère. L'autre est sous terre depuis 12h10. À moins qu'il ait une bonne poche d'air autour de lui... C'est lourd, de la terre», a-t-il laissé tomber, la mort dans l'âme.

C'est à 16h40 que le corps sans vie de M. Lévesque a été récupéré.

Un médecin a constaté sa mort sur place.

La veuve, qui a suivi toute l'opération de l'extérieur du périmètre de sécurité, parmi les médias et les badauds, a alors enfin pu s'approcher, avec un de ses trois enfants.

Elle a pu voir la dépouille et tout le groupe s'est ensuite retiré dans le tumulte.

La Commission de la santé et de la sécurité du travail fait enquête sur ce drame. Elle juge a priori que la tranchée aurait été sécurisée par une cage érigée tout autour pour éviter les affaissements.

«C'est ce qu'ils étaient en train de faire», a indiqué l'homme qui a tenté de les secourir avec la pelleteuse.

 

 

Photo : Patrick Sanfaçon, La Presse