Pour la quatrième fois en une semaine, un café italien du quartier Saint-Michel a été la cible d'un attentat au cocktail Molotov cette nuit. Règlements de compte? Intimidation? Conflits entre tenanciers? La police se fait avare de commentaires et poursuit son enquête sur ces événements.

De toute évidence, les cafés italiens du quartier Saint-Michel sont dans le collimateur d'incendiaires. Vers quatre heures ce matin, c'était au tour du café Aviano, à l'angle du boulevard Saint-Michel et de la rue Legendre, d'être visé. Des éclats de verre traînent encore ce matin devant la façade du café. Le Service de police de la ville de Montréal a été alerté par le système d'alarme de l'établissement, qui a retenti lorsque le ou les suspects ont fracassé la vitrine avec une brique. Comme dans les incidents antérieurs, un cocktail Molotov a ensuite été balancé à l'intérieur de l'établissement, avant de s'éteindre rapidement. Les dommages sont donc minimes au café Aviano.

La semaine dernière, après les trois premiers attentats contre des cafés du quartier, Cyberpresse avait interrogé le propriétaire du café Aviano sur la situation. Ce dernier nous avait confié être très surpris par ces attaques et disait n'avoir reçu aucune menace. Enfin, il se croisait les doigts pour éviter d'être à son tour pris pour cible. Malheureusement, son souhait n'a pas été exaucé.

Les cafés italiens visés sont tous de petits établissements, qui se fondent presque dans le paysage résidentiel. Des logements sont d'ailleurs emménagés au-dessus de chaque café ciblé. La situation n'a rien de rassurant pour les locataires interrogés. Élisabeth et sa famille dormaient à poings fermés lorsqu'une brique a été projetée au travers de la vitrine du café Aviano cette nuit. «Mon mari est allé voir en bas. Il est revenu et m'a dit d'appeler les pompiers, parce que de la fumée s'échappait du café. Les policiers étaient déjà là et disaient que c'était sous contrôle», raconte la locataire, un peu secouée par cette nuit mouvementée. «C'est un café pourtant paisible et tranquille», ajoute-t-elle.

Dans la nuit de jeudi dernier, c'était au tour du Café Bistro Charland d'avoir tiré le mauvais numéro. Vitrine fracassée, cocktail Molotov balancé : le manège était identique tout comme l'heure de l'attentat.

Les dommages étaient aussi minimes au café de la rue Charland. Une semaine plus tard, un employé rencontré sur place dit ignorer pourquoi le café a été ciblé. «On n'a reçu aucune menace, il n'y a pas de drogue ou d'activités illégales ici, seulement des clients qui jouent aux cartes», explique l'employé du café, achalandé en matinée.

Les deux premiers cafés italiens visés par des attentats l'ont été à dix minutes d'intervalle dans la nuit de mercredi. Le premier incident était survenu comme les autres vers 4h du matin, au café Pirandello de la rue Robert. L'autre s'est ensuite déroulé au bar Peaches du boulevard Saint-Michel.

Quelques heures après l'attentat, le propriétaire du Pirandello, interrogé devant son café, s'était fait avare de commentaires. «Je n'étais pas ici moi, je ne sais pas ce qui s'est passé», avait lancé l'homme, qui disait opérer depuis 40 ans un bistro sans histoire. «Je n'ai jamais eu de problème ici, il n'y a pas de drogue ni de gambling», avait ajouté le propriétaire.

Même discours de la part du fils du propriétaire du bar Peaches, qui ne semblait pas croire que quelqu'un pourrait s'en prendre à l'établissement. «On est ouvert depuis longtemps, on n'a jamais eu de menace. Hier soir, tout était normal. C'est un endroit tranquille, j'ignore qui pourrait faire quelque chose de même», avait expliqué Tino, rencontré devant le petit bar, discret de ce secteur résidentiel.

Les employés de plusieurs cafés italiens des environs interrogés depuis la semaine dernière se sont montrés surpris par cette vague d'attentats et ont dit n'avoir fait l'objet d'aucune menace. Une employée rencontrée la semaine dernière dans son café du boulevard Saint-Michel suggérait que ces incidents pourraient être des sanctions imposées à des tenanciers ayant refusé l'accès à la pègre entre leurs murs. D'autres ont évoqué la forte présence des gangs de rue dans le secteur.

C'est la section des incendies criminels du Service de police de la ville de Montréal qui enquête sur ces quatre incidents. Personne n'a encore été arrêté. À l'instar des employés des endroits vandalisés, le SPVM affirme ne pas avoir eu vent d'animosité entre les tenanciers du coin.

Plein les bras

La section des incendies criminels du SPVM en a plein les bras depuis quelque temps. Outre les attentats ciblés contre des cafés italiens du quartier Saint-Michel, plusieurs brasiers d'origine criminelle ont ravagé dernièrement des bâtiments, la plupart sur le Plateau Mont-Royal. Deux incendies criminels ont été allumés hier et avant-hier dans des immeubles de cet arrondissement. Le Plateau a été le théâtre d'une dizaine d'incendies d'origine suspecte depuis le mois de juin.

La police n'est pas en mesure d'établir des liens entre ces incendies suspects mais craint un effet boule de neige.

Enfin, un autre incendie d'origine suspecte a mobilisé 125 pompiers cette nuit dans un immeuble désaffecté d'Hochelaga-Maisonneuve. Deux bâtiments voisins, dont un qui a été touché par les flammes, ont dû être évacués.

Une fois de plus, le dossier a été remis aux policiers.