Une mère de trois enfants coupable d'infanticide pourrait être obligée par la Cour demain de se soumettre à un test de grossesse tous les six mois dans le cadre d'une peine de 20 mois à purger à domicile. Cette Montréalaise de 43 ans a reconnu en novembre dernier avoir causé la mort de sa fille qu'elle venait de mettre au monde, le 16 juillet 2016.

À l'été 2016, la Montréalaise ignore qu'elle est enceinte de 34 semaines. Son mari la découvre assis dans la salle de bains en pleine hémorragie. Il appelle les secours en panique et déplace sa femme dans le salon. Les ambulanciers font une sordide découverte dans le bain : une petite fille, mal en point, enfermée dans un sac de plastique noué par deux noeuds.

Les secouristes trouvent une paire de ciseaux «assez longue» près du sac et constatent que le cordon du nouveau-né a été coupé. «Des blessures sont faites, lorsqu'on a tenté de le réanimer. Mais il a un trou dans la tête et on doit lui faire trois points de suture. Le bébé est débranché deux jours après», indique le résumé des faits présenté à la cour en novembre par la procureure de la Couronne France Duhamel.

Ce n'était pas la première fois que l'accusée faisait un «déni de grossesse». En 2013, elle s'était présentée à un hôpital montréalais enceinte de sept mois. Or, elle ignorait être enceinte et disait aux médecins avoir chuté en faisant des travaux. Placée en psychiatrie, elle avait ensuite accouché de son troisième enfant en août 2013. Nous ne pouvons identifier l'accusée en raison de la présence de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) dans le dossier.

L'infanticide est un crime rarissime tout à fait distinct dans le Code criminel du meurtre ou de l'homicide involontaire. Il touche uniquement une femme qui a l'esprit «déséquilibré» parce qu'elle «n'est pas complètement remise d'avoir donné naissance» ou par la «lactation consécutive à la naissance de l'enfant». Ce crime n'a donc rien à voir avec la non-responsabilité criminelle pour troubles mentaux. D'ailleurs, la Montréalaise ne souffre d'aucune maladie mentale, selon les spécialistes.

Un risque de récidive «faible»

Les avocats ont suggéré hier à la juge Linda Despots d'imposer à l'accusée une peine de 20 mois avec sursis à purger à domicile, suivie d'une probation de 3 ans. 

«L'envoyer en prison, ça priverait les trois enfants de leur mère. Je pense qu'avec un sursis et une longue probation, si la dame tombe enceinte, on aura la possibilité de vérifier», affirme, Me Duhamel.

Fait exceptionnel : les parties proposent à la juge d'imposer à l'accusée de passer un test de grossesse tous les six mois pendant les quelque cinq années de sa peine et de sa période de probation. «J'ai demandé à ma cliente si elle était prête à se soumettre ça, et non seulement elle est prête, elle le fait depuis longtemps», a expliqué Me Joseph La Leggia, à la sortie de cour. Cette condition, «une première au Canada» selon l'avocat de la défense, a pour but de «réconforter le public» de l'absence de danger de sa cliente. Notons que son risque de récidive est jugé «faible», mais pas inexistant.

Cette suggestion commune semble «raisonnable à première vue» selon la juge Despots. Néanmoins, elle a décidé de rendre sa décision demain matin afin de réfléchir à la question.