L'homme d'affaires Tony Accurso a donné 300 000 $ au maire de Mascouche, ce qu'il prétend être un prêt et non un pot-de-vin, mais à aucun moment depuis 2008 il ne s'est préoccupé de son remboursement et aucun contrat de prêt n'atteste de l'entente.

« Je viens d'une génération pour qui une poignée de main vaut plus que des papiers », a expliqué hier Tony Accurso à son procès, qui se déroule au palais de justice de Joliette. L'entrepreneur est accusé d'avoir aidé l'ancien maire de Mascouche Richard Marcotte (mort en 2016) à commettre un abus de confiance relativement à l'attribution de contrats municipaux pour des usines d'eau, en contrepartie de pots-de-vin.

Le chèque de 300 000 $ constituerait l'un de ces pots-de-vin, selon la poursuite. En interrogatoire et en contre-interrogatoire hier, Tony Accurso a dû se défendre de son peu d'empressement à ravoir son argent ainsi que de son manque d'intérêt à connaître les raisons qui ont poussé M. Marcotte à lui demander une telle somme. Pour M. Accurso, tout s'explique parce que l'ancien maire était « un chum ».

D'ailleurs, tout s'est fait très rapidement, selon ce qu'a relaté l'accusé. Lui et Richard Marcotte ont soupé ensemble un mercredi soir d'avril 2008, comme c'était souvent leur habitude. M. Marcotte voulait profiter d'une occasion d'affaires pour investir dans l'immobilier avec un promoteur, a témoigné M. Accurso, qui ne lui a posé aucune question.

Dès le lendemain, un chèque de 300 000 $ était émis au nom d'une entreprise du Panamá avec un compte en Suisse, Verona Equities Corp., dont l'ayant droit était Richard Marcotte. Tony Accurso ne s'est pas interrogé sur les raisons de cette façon de faire.

Le chèque a été tiré de la division des grands projets de Simard-Beaudry. Il a été mis dans une enveloppe déposée à la réception au nom de M. Marcotte. Par la suite, le chèque a été certifié.

Le juge James Brunton, de la Cour supérieure, qui préside le procès de M. Accurso, est intervenu durant l'interrogatoire, cherchant à comprendre pourquoi l'entrepreneur n'a pas cherché à récupérer son argent pendant les huit années suivantes.

Tony Accurso a d'abord dit que cela n'a jamais été discuté avec M. Marcotte. Devant l'insistance du juge, il a précisé que dans l'immobilier, les résultats ne sont pas immédiats. « Vous n'étiez pas curieux ? » a alors ajouté le juge Brunton. « Sa parole était bonne », a répondu M. Accurso.

La somme n'a jamais été remboursée.

Le Touch

Les voyages de M. Marcotte à bord du bateau Touch ont également fait l'objet de plusieurs questions ; selon la poursuite, il s'agit là d'autres pots-de-vin offerts à l'ancien maire pour l'influencer. Tony Accurso a martelé qu'à aucun moment, ces voyages n'étaient l'occasion de discuter d'affaires. Il a toujours assumé les frais de ses invités, sauf pour son « ami d'enfance » Frank Zampino, ex-président du comité exécutif de la Ville de Montréal, a-t-il insisté. M. Zampino lui a remboursé 5000 $ parce qu'« il se sentait plus à l'aise ».

Le témoignage de Tony Accurso clôt la preuve de la défense. Les parties présenteront leur plaidoirie respective à compter de demain. Le juge James Brunton a prévu donner ses directives au jury lundi. Par la suite, les 12 jurés seront séquestrés pour analyser le dossier.