Après cinq longues années d'attente, Dania Nehme a enfin crié de joie dimanche. Le verdict tant espéré est tombé : son père Ahmad Nehme, le bourreau de sa mère, Catherine de Boucherville, a été déclaré coupable de meurtre prémédité. «Ça m'a pris une bonne demi-heure pour le réaliser!», s'exclame la jeune femme, un sourire radieux, en entrevue avec La Presse.

« Je suis vraiment soulagée ! Il y a un énorme poids qui s'est enlevé de mes épaules, non seulement à moi, mais à toute ma famille maternelle. Ça fait vraiment du bien que la justice ait été rendue !», lance-t-elle. Souriante, les yeux pétillants, la Dania Nehme rencontrée hier était transformée, loin de la jeune femme venue confronter son père pendant le procès dans un percutant témoignage.

Néanmoins, la jeune femme de 22 ans était hantée que le jury croie les «mensonges» de son père et le déclare non criminellement responsable pour troubles mentaux. La défense plaidait qu'Ahmad Nehme était atteint d'un trouble délirant au moment de poignarder une quinzaine de fois sa femme le 5 juillet 2012 à LaSalle. Le jury a plutôt cru qu'il avait planifié le meurtre de sa femme qui avait rompu avec lui quelques jours plus tôt. 

« C'est un homme très jaloux, par contre il n'y a pas de délire. Je le connais assez pour dire qu'il n'était pas fou du tout, il savait très bien ce qu'il faisait. Il a toujours été colérique, agressif, il nous a harcelé. Toute ma vie, mon père m'a vraiment manipulé, intimidé. Disons qu'il n'a pas toujours été très gentil», dit-elle, échappant un rire nerveux. 

Dania Nehme respire maintenant l'optimisme. Une page de sa vie, remplie d'horreur, de larmes, puis de résilience, a été tournée dimanche. «Je pense que je vais être capable de finalement fermer le livre. Commencer une nouvelle page, une nouvelle vie, essayer de mettre ça derrière moi et de me concentrer sur mes études», dit-elle, en soufflant littéralement de soulagement. Son objectif : obtenir sa maîtrise en finances, et qui sait, peut-être même un doctorat. «On verra rendu là!», lance-t-elle.

Mais ce verdict ne lui ramènera pas sa mère, Catherine de Boucherville. Cinq plus tard, Dania Nehme parle toujours d'elle avec une profonde admiration. « Elle nous manque tous terriblement. Si seulement vous la connaissiez, vous pourriez comprendre à quel point c'est une perte énorme. C'est une femme si formidable, incroyable, elle est hors du commun, elle est pleine d'amour, de bonheur, de positivité», lâche-t-elle d'un trait, la voix légèrement cassée. 

Après avoir passé sa vie à vivre «l'enfer» auprès de son père, Dania Nehme appelle les victimes à dénoncer leur agresseur. «Dès qu'il y a un signe de violence, il faut vraiment parler. C'est la première étape pour s'en sortir. C'est une erreur, honnêtement, de le garder pour soi. Je sais qu'on peut avoir peur d'en parler, mais même si c'est un prof, un ami ou quelqu'un d'autre de la famille, dès que tu en parles, tu vas te sentir mieux. Et c'est à partir de là que tu vas être capable de t'en sortir», conseille-t-elle avec conviction.

Photo fournie par le SPVM 

Ahmad Nehme a été reconnu coupable du meurtre de sa femme, Catherine de Boucherville, dimanche.