Avant 13 h, le 22 janvier 2014, des policiers de la Sûreté du Québec (SQ) étaient à l'affût pour coincer le conducteur d'une Mazda RX8 volée, qui avait été vue dans le stationnement de la polyvalente Augustin-Norbert-Morin, à Sainte-Adèle. Quelques minutes après 13 h, ledit conducteur, David H. Lacour, 17 ans, agonisait dans le stationnement de la polyvalente, atteint de deux balles tirées par un policier, devant des témoins affolés et médusés.

C'est ce qui ressort des premiers témoignages rendus hier au procès d'Éric Deslauriers. Le policier, qui est suspendu avec solde, est accusé d'homicide involontaire. La Couronne estime qu'il a déchargé son arme à feu de façon insouciante. La défense plaidera qu'il a agi par légitime défense, car le jeune homme fonçait sur lui avec sa voiture. 

Une élève de 13 ans, qui a assisté à la scène et qui en a même filmé une partie, a raconté que le policier était sorti de sa propre voiture et avait ordonné au conducteur de la voiture rouge de sortir de la sienne. Il a répété son ordre, mais le conducteur n'a pas voulu obéir. La jeune fille a vu le conducteur lever les mains, puis les rabaisser. Il n'a pas obtempéré, il a plutôt pesé sur l'accélérateur et foncé en direction du policier, selon elle. Elle dit avoir vu le policier faire un bond de côté, « sortir son fusil » et tirer. Deux coups. 

Un autre élève qui a vu la scène a rendu un témoignage semblable. Mais selon lui, le policier a demandé trois ou quatre fois au jeune homme de sortir du véhicule. Celui-ci a « rincé son moteur » avant de foncer, « la pédale au fond ». Le témoin pense que le policier a d'abord tiré vers les pneus, car il se souvient qu'il avait l'arme vers le bas. 

EN JOUE 

Le directeur adjoint de l'école, Daniel Gauthier, a assisté à une partie de la scène. Selon lui, le policier a mis en joue le conducteur de la voiture rouge. Le jeune homme a levé les mains, puis les a rabaissées vers le volant. « Puis ç'a déboulé », a raconté le témoin. 

Il était certain que la voiture rouge allait partir, les « roues spinnaient ». M. Gauthier s'est précipité vers une autre fenêtre pour voir ce qui arrivait. Le drame s'est produit pendant ce court trajet. Il a entendu deux coups de feu. Quand il a regardé de nouveau, le policier ouvrait la porte de la voiture rouge, qui était dans un banc de neige, et effectuait des manoeuvres sur le jeune homme. 

« RENFORT D'URGENCE »

Le policier Dominique Gingras, de la SQ, est arrivé à 13 h 06 sur les lieux, après que son collègue Deslauriers a demandé du « renfort d'urgence » sur les ondes. Un autre policier qui était là lui a demandé de prendre la place du policier Deslauriers. Ce dernier, qui portait des gants chirurgicaux, était dans la « porte » de la voiture rouge, et s'occupait du blessé. « Le policier Deslauriers m'a dit de mettre ma main au bas du cou, et j'ai fait pression à ce niveau-là. » M. Gingras ne savait pas ce qui s'était produit. Il voyait du sang dans le véhicule, et cherchait des éclats de verre. « Mais je n'en ai pas trouvé », a-t-il dit. Il a entendu le blessé râler. Il avait un pouls, mais il était faible. Il a expliqué qu'au deuxième râle, il n'y avait plus de pouls. 

Les ambulanciers ont pris la relève, mais le jeune homme a été déclaré mort vers 14 h 10, à l'hôpital. Le procès se poursuit aujourd'hui, à Saint-Jérôme, devant la juge Joëlle Roy. Me Julie Laborde représente la Couronne, tandis que l'accusé est défendu par Me Nadine Touma.