L'organisateur libéral Jacques Corriveau était une personne «importante» au sein du parti, et un proche du premier ministre Jean Chrétien et de son épouse Aline. Mais la preuve qu'il s'est servi de son influence dans l'octroi des commandites n'a pas été faite à son procès.

C'est, en résumé, ce que Me Gerald Soulière a fait valoir, mardi, lors de sa plaidoirie. Son client de 83 ans est jugé par un jury pour des accusations de trafic d'influence, fabrication de faux documents et blanchiment d'argent. Le ministère public lui reproche d'avoir agi comme intermédiaire pour favoriser l'octroi de commandites, entre 1997 et 2003. Au cours du procès, la Couronne a voulu démontrer que M. Corrriveau demandait une commission de 17,5 % pour chaque commandite obtenue, ce qui lui aurait rapporté environ sept millions de dollars. 

Me Soulière reconnaît d'emblée que M. Corriveau connaissait tout le monde au parti libéral, en raison de son cheminement. «Dès 1984, il a choisi son camp, il a appuyé Jean Chrétien», qui allait devenir premier ministre en 1993. «Il a eu du flair, il a appuyé la bonne personne au bon moment. C'est certain que ça a eu des conséquences. Ça l'a mis en contact avec tout le monde chez les libéraux», a-t-il ajouté.

Le programme des commandites a été créé en 1997, afin d'accroître la visibilité du Canada au Québec. Cette initiative suivait un vote serré sur le référendum de 1995. Le programme a été créé discrètement, sans tambour ni trompette, et sa façon de faire était un peu particulière, selon Me Soulière.

 «Il n'était pas question que le Parti libéral annonce qu'il saupoudrait le terme Canada partout au Québec. Il n'y avait pas d'appels d'offres», a plaidé l'avocat, avant de dire que l'argent était disponible, et qu'il fallait se présenter et faire une demande.

Me Soulière a invité le jury à la prudence face au témoin Luc Lemay. Ce dernier aurait obtenu 40 millions en commandites, grâce à l'implication de M. Corriveau, qu'il devait payer en retour. L'avocat s'est employé à relever les contradictions en comparant le témoignage que M. Lemay a livré à la Cour, au début de ce procès, avec celui qu'il avait donné il y a une douzaine d'années, dans le cadre de la commission Gomery. Le procureur de la Couronne y voit des subtilités, tandis que l'avocat de la défense y voit des différences suffisamment importantes pour miner sa crédibilité.

Le procès de M. Corriveau tire à sa fin. Les jurés devraient entamer leurs délibérations dans les prochains jours.