Une ex-employée d'un hôpital montréalais mène depuis huit ans une guérilla judiciaire contre son ancien employeur et deux avocates de l'établissement. Elizabeth Plomp a été déclarée plaideuse quérulente l'an dernier pour avoir intenté un nombre « incalculable de recours », parfois jusqu'en Cour suprême. Le mois dernier, le Tribunal des professions lui a infligé un énième revers. Récit d'une saga judiciaire.

À l'été 2008, Elizabeth Plomp perd son travail au service d'hygiène et de la salubrité du Centre hospitalier de St. Mary, dans l'ouest de Montréal, après avoir échoué à sa période d'essai. Or, même si elle travaillait à temps plein depuis trois ans dans un autre secteur de l'hôpital, elle ne peut reprendre son ancien poste non syndiqué et non permanent en raison des règles d'attribution des postes.

Furieuse, Elizabeth Plomp dépose une plainte devant la Commission des relations du travail pour « congédiement sans cause juste et suffisante », laquelle sera rejetée en janvier 2010. Trois ans et quatre jugements plus tard, la Cour suprême du Canada portera un coup fatal à sa croisade.

Mais Mme Plomp ne s'arrête pas là. En parallèle, elle dépose en avril 2012 une plainte privée au Conseil de discipline du Barreau du Québec contre l'avocate Magali Cournoyer-Proulx et réclame sa radiation provisoire. Elle accuse Me Cournoyer-Proulx, qui représentait alors le Centre hospitalier de St. Mary devant les tribunaux, d'une série de graves infractions déontologiques.

ACCÈS LIMITÉ À LA JUSTICE

Mais avant même que sa plainte ne soit rejetée, en janvier 2014, Elizabeth Plomp dépose une deuxième plainte privée contre l'avocate, puis une première visant Me Mélanie Sauriol, qui représente aussi l'hôpital. C'en est trop : deux semaines plus tard, une juge de la Cour supérieure interdit à Mme Plomp de déposer une plainte disciplinaire contre des avocats sans l'autorisation du syndic du Barreau. Pour la première fois, le tribunal limite l'accès à la justice à Elizabeth Plomp.

Dans le même jugement, la juge Guylène Beaugé rejette la poursuite de 200 000 $ intentée par Mme Plomp contre le Centre hospitalier de St. Mary et sept de ses employés pour congédiement illégal. Son recours était tout simplement prescrit.

Les innombrables requêtes déposées par la Montréalaise en quelques années seulement incitent le juge en chef de la Cour supérieure, François Rolland, à lancer en janvier 2014 les procédures pour faire déclarer Elizabeth Plomp plaideuse quérulente. Ce statut exceptionnel oblige un citoyen à demander une autorisation spéciale pour déposer un recours judiciaire.

DÉCLARÉE PLAIDEUSE QUÉRULENTE

Elizabeth Plomp exige alors que le juge Paul Mayer, désigné pour l'audition de cette demande, se récuse. Elle dépose également une plainte au Conseil canadien de la magistrature, laquelle sera rejetée par le juge lui-même. La Cour d'appel fera ensuite de même à deux reprises. Finalement, en mai 2015, le juge Paul Mayer déclare Elizabeth Plomp plaideuse quérulente en Cour supérieure et en Cour du Québec. 

« Le plus récent chapitre de la longue saga judiciaire », comme l'évoque le Tribunal des professions, s'est conclu le 1er avril dernier, avec le rejet de l'appel de Mme Plomp de la décision du Conseil de discipline du Barreau concernant la deuxième plainte intentée contre Me Cournoyer-Proulx, maintenant au service du cabinet Lavery.

Une porte-parole du cabinet a indiqué par courriel que Me Cournoyer-Proulx préférait « ne pas émettre quelconque commentaire qui pourrait avoir pour effet de susciter de nouvelles procédures ».

Il n'a pas été possible de joindre Elizabeth Plomp.