Un ancien vérificateur de l'Agence du revenu du Canada, soupçonné de corruption, se bat devant les tribunaux pour récupérer 11 lingots d'or et 100 000$ découverts chez lui lors d'une perquisition l'automne dernier.

L'homme, qui a fait toute sa carrière à l'Agence et qui a ouvert son propre bureau de fiscaliste en 2007, fait actuellement l'objet, avec d'autres individus, d'une enquête de la Gendarmerie royale du Canada qui dure depuis près de trois ans. Les actes reprochés auraient été commis entre 2005 et 2013.

Le 20 novembre dernier, dans une résidence appartenant au suspect, dans Charlevoix, les enquêteurs ont trouvé 11 petits lingots d'or «de la grosseur d'un iPhone» dans l'une des chambres à coucher et dans le tiroir de la cuisinière. En plus des lingots, d'une valeur totale de 650 000$, ils ont aussi découvert 100 000$ enfouis au fond d'un sac, dans un meuble de la salle à manger.

«Les infractions étaient corruption de fonctionnaire, abus de confiance par un fonctionnaire public et fraude envers le gouvernement. Mais deux autres infractions, soit possession de biens criminellement obtenus et recyclage des produits de la criminalité, ont été ajoutées lorsque nous avons exécuté les mandats», a affirmé récemment l'enquêteur André Jean de l'Unité de la corruption et des délits commerciaux de la GRC.

L'ancien fonctionnaire, qui est maintenant fiscaliste à son compte et «qui aide à faire entrer de l'argent de l'extérieur au Canada», a expliqué son avocat, a été arrêté lors de la perquisition mais n'a toujours pas été accusé.

Outre les lingots et l'argent, les enquêteurs ont saisi des documents, des ordinateurs et des clés USB qui sont en cours d'analyse. La police a demandé l'aide d'un juricomptable et a encore des témoins à interroger, au Canada et aux États-Unis.

La GRC, qui estime que l'enquête durera encore plusieurs mois, veut conserver les 11 lingots et les 100 000$ tant qu'elle ne sera pas terminée.

Mais l'homme, qui nie que les lingots et l'argent soient liés au recyclage des produits de la criminalité, a formulé une requête visant à les récupérer.

Le juge Jean-Pierre Boyer de la Cour du Québec a partiellement accueilli sa requête en permettant à la GRC de les conserver jusqu'au 20 juillet prochain. «Après, on verra», a dit le magistrat.

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Des lingots qui valent leur pesant d'or

Les lingots d'or offrent plusieurs avantages aux criminels, en particulier aux membres des groupes organisés. C'est pourquoi les policiers ont le réflexe d'ouvrir un volet «produits de la criminalité» dans leurs enquêtes aussitôt qu'ils en découvrent. «C'est une façon de blanchir de l'argent. On achète de l'or avec de l'argent sale et on le revend», explique une personne du milieu judiciaire spécialisée dans le domaine. «Le prix de l'or est relativement stable, et il aura toujours une certaine valeur. C'est un métal qui se vend partout dans le monde, qui te permet d'acheter n'importe quelle marchandise et que tu peux échanger contre n'importe quoi», ajoute notre source. L'information obtenue du Bureau de lutte aux produits de la criminalité du Québec et les chiffres fournis par les corps policiers ne permettent pas de constater clairement une hausse de l'utilisation des lingots d'or à des fins criminelles.

- Avec la collaboration de William Leclerc et Serge Laplante