La Cour d'appel du Québec a récemment accepté de réduire d'une journée la peine de prison d'un proxénète étranger afin de lui donner une chance de demeurer au Canada.

Ce type de décision est vivement critiqué par Jason Kenney, ministre fédéral de l'Immigration.

Mohammed Abdulkadir Abdurazak, un résident permanent, avait été condamné en 2011 à deux ans de détention pour proxénétisme. L'infraction est passible d'un emprisonnement de dix ans et la peine imposée «est au bas de la fourchette en semblable matière», selon la Cour d'appel.

Quelques mois après cette décision, Immigration Canada a entamé des procédures d'expulsion contre le détenu.

Or, la loi prévoit une expulsion très rapide pour les étrangers qui ont été condamnés à au moins deux ans de prison pour un crime passible d'au moins dix ans de prison. Le gouvernement canadien parle alors de «grande criminalité».

Les autres individus jugés coupables d'infractions criminelles peuvent faire valoir des motifs humanitaires pour rester au Canada lors d'une audience particulière.

Fin avril, la Cour d'appel a soustrait 24 heures à la peine de M. Abdulkadir Abdurazak. «Il nous semble que la conséquence [d'une peine de deux ans] est disproportionnée par rapport à la peine que subirait un autre délinquant pour un crime commis dans les mêmes circonstances», ont écrit les juges.

Les peines imposées aux criminels doivent prendre en compte leurs caractéristiques individuelles, selon le tribunal.

Pas un détournement de la loi

L'un des avocats du proxénète, Me Clemente Monterosso, s'est réjoui de la décision de la Cour d'appel.

«Ce n'est pas parce qu'il a eu une sentence de deux ans moins un jour qu'il pourra rester au pays, mais au moins il aura le loisir d'aller en appel sur des motifs humanitaires», a commenté l'avocat. Toute la famille de M. Abdulkadir Abdurazak est au Canada, ce qui pourrait constituer le coeur de sa cause.

Les «conséquences indirectes d'une peine infligée sur le statut au Canada» font partie des critères à prendre en compte pour déterminer une peine, a-t-il ajouté. «Ça ne contourne aucunement la loi, c'est le côté humain de la loi plutôt.»

Me Monterosso a tenu à préciser que cette réduction de peine avait seulement été possible parce que son client était sur la limite de la peine de deux ans. «C'est sûr qu'on pourrait pas réduire une sentence de cinq ans à deux ans moins un jour.»

Kenney «inquiet»

Le bureau du ministre fédéral de l'Immigration, Jason Kenney, a refusé de commenter le cas particulier.

Son attachée de presse s'est contentée d'envoyer à La Presse un discours prononcé par M. Kenney il y a deux ans.

«Des juges donnent souvent des sentences de deux ans moins un jour pour permettre au criminel d'échapper à une déportation rapide, avait-il alors dénoncé. Ce sont des cas comme ceux-là qui frustrent les Canadiens, et je les comprends. Nous ne devrions pas rejeter ces frustrations. Nous devrions les écouter, les prendre au sérieux.»

Jason Kenney avait ajouté que le système judiciaire devait faire davantage confiance aux autres éléments du système de protection des immigrants et laisser le ministère faire son travail.