« On est tous terrifiés, abasourdis et choqués. » Il n'y avait plus une seule place de libre dans la salle principale du centre communautaire Elgar à L'Île-des-Soeurs. Réunis par centaines, des proches, amis et concitoyens s'étaient entassés pour apporter un peu de réconfort à la famille de l'adolescent de 17 ans, victime d'un meurtre, retrouvé sans vie lundi dernier.

« On est tous terrifiés, abasourdis et choqués. » Il n'y avait plus une seule place de libre dans la salle principale du centre communautaire Elgar à L'Île-des-Soeurs. Réunis par centaines, des proches, amis et concitoyens s'étaient entassés pour apporter un peu de réconfort à la famille de l'adolescent de 17 ans, victime d'un meurtre, retrouvé sans vie lundi dernier.

« Nous sommes tous ici concernés par ce qui se passe », a lancé l'instigateur de la veillée et administrateur du centre islamique Al-Jazira, Mourad Bendjennet, debout sur la scène. Devant lui, assise dans la première rangée, la mère de la victime n'arrivait pas à contenir ses sanglots. À son côté, l'aîné l'entourait de son bras.

« C'est un geste d'amour qu'on envoie à la maman, dédié à elle, parce que ça peut arriver à n'importe quel parent. » - Mourad Bendjennet

La cérémonie, à laquelle des élus de la région prenaient aussi part, était chargée d'émotion. « Les gens de L'Île-des-Soeurs sont tissés serré », a aussi déclaré M. Bendjennet en entrevue à La Presse.

Deux adolescents, eux aussi âgés de 17 ans, un garçon et une fille, ont été arrêtés mardi soir par le Service de police de la Ville de Montréal et ont été accusés hier de meurtre au second degré, en Cour du Québec, chambre de la jeunesse. L'identité de la victime ainsi que celles des accusés demeurent protégées puisqu'ils sont tous d'âge mineur.

TRAQUENARD FUNESTE

La jeune victime d'origine marocaine a été trouvée morte lundi matin dans un secteur boisé situé près de la rue de Gaspé. Au départ, les policiers ont cru à une mort accidentelle, mais le coroner a conclu à un meurtre. Selon nos informations, l'adolescent a été victime d'un traquenard qui devait se terminer par un vol d'argent et de drogue, mais qui a mal tourné.

Toujours selon nos informations, les accusés, qui formeraient un couple, auraient avant tout eu l'intention de voler la victime. Celle-ci aurait été ciblée parce qu'elle aurait commencé à vendre de la marijuana dans les semaines précédentes.

Il semble que le rôle de la jeune femme ait été de faire croire à la victime qu'elle voulait lui acheter des stupéfiants pour ensuite l'attirer dans un endroit dans le boisé, où son copain s'était caché. 

Lorsque la victime s'est présentée au lieu du rendez-vous, dimanche soir, l'autre adolescent aurait bondi sur lui et les choses auraient dégénéré.

L'agresseur aurait sorti un couteau et aurait profondément poignardé la victime à une jambe, sectionnant vraisemblablement une artère principale. On ignore ce qui s'est passé par la suite, mais il se pourrait que les suspects aient tenté de maquiller la scène pour faire croire à une mort accidentelle. Le couple n'a visiblement pas communiqué avec les secours et on ne sait pas si le jeune homme aurait pu être sauvé en cas d'intervention rapide.

NON À LA VIOLENCE

Mais hier, l'heure n'était pas à ressasser les détails du drame. « Ça aurait pu être mon fils », a lancé le maire de Verdun, Jean-François Parenteau, visiblement ému. « Personne ne comprend. Cette colère, il faut la transformer en amour. Comme communauté, qu'est-ce qu'on peut faire [...] pour éviter des gestes d'une violence comme celui-là ? »

La députée provinciale, Isabelle Melançon, et son homologue fédéral, Marc Miller, ont aussi pris la parole. Ils étaient tout aussi ébranlés devant la foule rassemblée. « Ce soir, c'est un pas contre la violence. On doit continuer à en parler à nos jeunes », a affirmé la députée libérale avant de proposer d'observer une minute de silence à la mémoire de la victime.

Tous les proches consultés par La Presse n'avaient que de bons mots à transmettre à propos de l'adolescent et de sa famille. 

« C'était le soleil de la maison, il veillait sur sa mère. Elle n'a jamais eu de problème avec lui. C'était un bon garçon. » - Leila, une amie de la dame

Le jeune vivait avec sa mère, chef de famille monoparentale, et son frère aîné, âgé de 20 ans.

« C'est une dame extraordinaire, d'une bonté rare », a exprimé M. Bendjennet au sujet de la mère de famille qui travaille dans une garderie de l'endroit. « C'est une éducatrice exceptionnelle qui a pris soin de mes enfants », a-t-il ajouté. C'est d'ailleurs pourquoi il a spontanément eu l'idée de mettre en branle un mouvement de solidarité.

Le centre islamique Al-Jazira a lancé une campagne de sociofinancement pour soutenir la famille endeuillée, qui vit modestement, a indiqué M. Bendjennet. En fin de soirée, quelque 20 000 $ avaient déjà été amassés. Le consulat général du royaume du Maroc a aussi confirmé la prise en charge des frais associés aux funérailles et au rapatriement de la dépouille.

Des parents avec de jeunes enfants et de nombreux camarades de classe étaient aussi sur place. « C'était un gars sans histoire et tellement apprécié. Ce qui se passe ce soir en témoigne », a soutenu un ami. D'autres étaient là simplement pour manifester leur sympathie. « Une mère ne doit pas enterrer son enfant. Nous voulons la soutenir », a dit Nadia.

PEINE POUR ADULTE DEMANDÉE

Lors de leur comparution hier, la poursuite a demandé un avis d'assujettissement à une peine pour adulte. Si c'est le cas, les jeunes s'exposent à une peine à perpétuité, plutôt qu'à une peine maximale de sept ans. La poursuite s'est également opposée à leur remise en liberté. Les suspects seront détenus dans un centre jusqu'à leur enquête sur remise en liberté fixée à la semaine prochaine.

Me Sophie Lamarre, procureure-chef adjointe au Bureau des affaires de la jeunesse, a laissé entendre que de nouveaux éléments de preuve pourraient être déposés à la prochaine date, ce qui peut vouloir dire que d'autres accusations pourraient être portées contre le duo.