Lorsque le code orange a été déclenché, lundi après-midi à l'hôpital Sunnybrook, personne sur place ne se doutait du drame qui venait de se dérouler à quelques kilomètres de là. Mais une seule chose était certaine : d'une minute à l'autre, les blessés seraient nombreux à passer les portes de l'établissement.

Pour le Dr Bourke Tillmann et ses collègues, les choses se sont déroulées très rapidement. Le Dr Tillmann est médecin aux soins intensifs et chef d'équipe dans l'unité de traumatologie, premier arrêt des personnes victimes d'accidents.

« C'était difficile de savoir à quoi s'attendre, a-t-il confié hier à La Presse. En fin de compte, c'était des cas que nous sommes habitués à voir, mais dans un volume démesuré. Une fois qu'on réalise ce qui arrive et qu'on l'accepte, les réflexes sortent et on revient à ce pour quoi on a été formés. »

Dix personnes ont été transportées à l'hôpital Sunnybrook, dont le service de traumatologie est le plus important du pays. Parmi ces patients, deux ne présentaient déjà plus de signes vitaux à leur arrivée. Sur les huit autres, cinq étaient dans un état critique.

Alors qu'une seule équipe de traumatologie est habituellement en fonction, trois groupes - pour autant de lits disponibles dans l'unité - ont alors été formés au pied levé.

Chacun des patients a donc été pris en charge simultanément par une escouade composée de traumatologues et d'autres spécialistes, de médecins fellows et résidents, d'infirmières et de techniciens en radiologie. « Un travail d'équipe incroyable », analyse le Dr Tillmann.

À LA VITESSE GRAND V

L'objectif : que chaque patient soit stabilisé en 20 minutes, top chrono, avant d'être transféré vers une autre unité - pour une intervention chirurgicale, par exemple.

« On procède à des réanimations, on pratique des opérations mineures ou majeures qui peuvent sauver des vies, mais il faut quand même que les patients passent le moins de temps possible au trauma. Dans une situation normale, on parle de 45 minutes ou moins. Mais lundi, il fallait libérer la place pour les patients suivants », explique le Dr Tillmann.

« C'est comme un sprint suivi d'un marathon, car les patients sont ensuite pris en charge par l'unité des soins intensifs, où ils sont susceptibles de passer plusieurs jours. » - Le Dr Bourke Tillmann

Pour le Dr Tillmann, il s'agissait d'une première opération de si grande envergure depuis qu'il pratique à Sunnybrook. Il a déjà affronté des volumes de patients du genre par le passé pendant un séjour au Moyen-Orient, mais « jamais dans un cadre aussi structuré », souligne-t-il.

Et il se dit fier du travail accompli par son équipe, alors que les huit patients toujours en vie au moment de leur admission ont tenu le coup.

Selon lui, « sans la vitesse et le professionnalisme des services d'urgence sur les lieux du drame puis à l'unité de trauma, ces personnes ne seraient plus en vie. »

Même s'il n'a que 32 ans, Bourke Tillmann sait déjà que cette intervention sera un jalon important dans sa carrière.

« L'impact que cet événement aura sur la ville de Toronto et sur ses citoyens est unique. Oui, nous sommes préparés à ce genre d'événement, mais ce que nous avons accompli est important pour moi. J'en parlais avec des collègues, et ils me disaient que c'est le genre d'événement dont on se souvient toute sa vie. C'est une grande source de fierté pour toute mon équipe. »