Le quadragénaire en détresse qui vivait avec la dépouille de sa mère dans le quartier Côte-des-Neiges a été accusé d'outrage à un cadavre, hier, alors que des organismes communautaires ont souligné l'importance de briser l'isolement des familles qui composent avec des problèmes de santé mentale.

Marko Juric, 45 ans, avait l'air calme, mais déboussolé lorsqu'il a comparu par vidéoconférence devant une juge du palais de justice de Montréal, hier. Maigre, les cheveux longs, il s'est installé de façon hésitante devant la caméra.

Il a été accusé d'avoir commis un « outrage, indécence ou indignité » à un cadavre, en l'occurrence la dépouille de sa mère, Hilda Juric Medica, morte autour du 1er février.

L'octogénaire d'origine croate habitait avec son fils et s'occupait de lui. Après la mort de la dame, le fils aurait conservé son corps deux mois dans l'appartement.

Dimanche, le concierge a remarqué l'odeur. Les policiers appelés sur place ont découvert que Marko Juric avait caché le corps putréfié dans un placard. L'homme a été conduit à l'hôpital, car il semblait avoir besoin de soins urgents.

RENCONTRÉ PAR UNE ÉQUIPE SPÉCIALISÉE

Lors de sa comparution, la procureure de la Couronne a demandé à ce qu'il soit rencontré par l'Urgence psychosociale-justice, une équipe spécialiste des situations impliquant des « personnes avec un état mental altéré ».

La juge a expliqué à l'accusé qu'il devrait revenir en cour aujourd'hui pour une enquête sur remise en liberté. « OK, merci ! » a-t-il lancé avant de partir.

La mère et son fils paraissaient plutôt isolés. Aucun des voisins interrogés dans le cadre de cet article ne se souvenait d'avoir discuté sérieusement avec eux.

APPELS À BRISER L'ISOLEMENT

Sans vouloir commenter ce cas particulier, la directrice générale du Réseau Avant de craquer, Hélène Fradet, a souligné que les cas de parents vieillissants qui s'occupent seuls d'un proche souffrant d'une maladie mentale augmentent.

« On fait face à une population vieillissante. Ça va se présenter de plus en plus, un parent qui n'a pas obtenu de soutien, qui ne sait pas comment naviguer dans ce système, qui se retrouve isolé », dit-elle.

« Le défi est de repérer et approcher les personnes en difficulté qui ne vont pas demander d'aide », ajoute-t-elle.

Son organisme, qui regroupe 39 associations d'aide aux familles de personnes atteintes de maladie mentale, signe des ententes avec des établissements de santé afin qu'on dirige vers les groupes communautaires les familles en détresse.

« À l'urgence, au guichet de santé mentale, après un séjour en psychiatrie, un intervenant peut dire : ‟Il y a une association près de chez vous, je pourrais leur transmettre vos coordonnées et ils vont entrer en contact avec vous" », explique-t-elle.

David Ford Johnson, directeur général de l'Association québécoise pour les parents et amis de la personne atteinte de maladie mentale, constate que le vieillissement inquiète sa clientèle.

« Beaucoup vivent avec des enfants qui ont des problématiques de santé mentale. Quand ils sont en forme, c'est une chose. Mais quand ils commencent eux-mêmes à avoir des ennuis de santé, ça peut jouer sur leur capacité à s'en occuper », dit-il, en soulignant que son organisme offre un accompagnement à ces familles.