La Ville de Montréal tient un « entrepreneur général externe » non identifié responsable de l'électrocution d'un chien survenue avant-hier dans l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal.

L'animal est mort alors qu'il se promenait avec sa propriétaire au coin des rues Rachel et Fullum, près de l'emplacement d'un lampadaire en voie d'être remplacé. D'après les experts consultés par La Presse, la situation était potentiellement dangereuse pour les humains, en particulier les enfants, mais la Ville assure avoir sécurisé les lieux.

« L'incident a été causé par une mauvaise installation d'un cache-base par l'entrepreneur externe. Les cache-bases sont des dispositifs temporaires installés lors d'un remplacement de lampadaire », a écrit la relationniste Gabrielle Fontaine-Giroux dans un courriel envoyé à La Presse. Le dispositif laissait donc passer le courant.

Ce n'est pas la première fois qu'un tel accident se produit. En 2016, TVA rapportait que deux chiens avaient reçu des décharges électriques dans Outremont « en raison de lampadaires mal protégés ».

En France, depuis 2010, plusieurs chiens ont été foudroyés par des décharges lors de promenades, que ce soit en marchant sur une lumière encastrée au sol ou sur un boîtier électrique usé qui alimentait l'éclairage public. D'autres chiens ont posé leur museau sur un fil rompu par la neige, ou se sont approchés d'éclairages de Noël fouettés par la mer, ou encore d'un lampadaire défectueux, alors qu'il pleuvait.

Dans plusieurs cas, les personnes ayant tenté de sauver les bêtes ont elles-mêmes reçu une décharge, mais n'ont pas été grièvement blessées.

Animal contre humain

« L'animal est beaucoup plus sensible au courant électrique que l'humain. Sa constitution le rend moins résistant au passage du courant, c'est pourquoi même un faible voltage peut le tuer. C'est presque instantané », explique le professeur Kamal Al-Haddad, professeur au département de génie électrique de l'École de technologie supérieure.

Les chiens urinent parfois sur les lampadaires et peuvent se retrouver les quatre pattes dans des flaques de pluie ou dans la neige. Or, l'eau réduit considérablement la résistance au courant.

Les humains sont partiellement protégés par leurs bottes en caoutchouc, car il ne s'agit pas d'un matériau conducteur. Les bottes humides sont toutefois moins efficaces, nuance le professeur Al-Haddad, pour qui un enfant aurait pu être blessé à la place du chien. « Un enfant, c'est plus fragile qu'un adulte », dit-il.

« Même avec des chaussures, le danger peut être là. Tout dépend de la sévérité du voltage », indique Keyhan Sheshyekani, professeur adjoint au département de génie électrique de Polytechnique Montréal.

À Miami, en 1998, un garçon de 12 ans a été électrocuté dans un abribus. Il avait mis le pied sur un câble alors qu'il se trouvait en contact avec le banc métallique.

Dans certains cas, il suffit même de marcher à proximité d'une installation électrique défectueuse, sans y toucher, pour recevoir une décharge électrique, précise le professeur Sheshyekani.

Cause de l'incident

La Ville de Montréal n'a pas précisé en quoi le cache-base du lampadaire du Plateau Mont-Royal avait été mal installé.

D'après deux experts en génie électrique interrogés par La Presse, il s'agit sans doute d'un problème de mise à la terre. Dans les rues, comme dans les logis, les appareils électriques doivent être munis d'un système fiable permettant d'attirer le courant dans le sol.

« Ceux à qui appartiennent des installations électriques ont la responsabilité de prévoir un bon système du genre, adapté à la composition du sol et bien fixé », affirme le professeur Sheshyekani.

« Même s'il y a une défectuosité, il n'y a alors aucun danger », confirme le professeur Al-Haddad. D'après lui, lorsqu'elle entreprend des travaux, la Ville devrait toutefois afficher des mises en garde et établir un périmètre de sécurité, au cas où ce système se trouverait endommagé ou temporairement hors d'état.

Dans son courriel à La Presse, Montréal indique que quatre lampadaires devaient être remplacés « dans le cadre des travaux d'égouts, de conduites d'eau, de voirie, de feux de circulation et d'éclairage ».

Depuis l'accident, une équipe d'entretien s'est assurée que les cache-bases des trois autres lampadaires n'étaient pas sous tension.

« Certaines actions pourraient être prises » contre l'entrepreneur, précise aussi la Ville. Mais l'entreprise qu'elle croyait responsable, Sade Canada, a affirmé à La Presse qu'on lui avait uniquement confié la réfection d'égouts et qu'elle n'avait aucunement participé au remplacement des lampadaires.