Deux Canadiens reconnus coupables de fraude et autres crimes financiers ont enseigné pour le compte de l'université de Donald Trump en 2010 avant qu'elle ne ferme ses portes, révèle une enquête menée conjointement par La Presse canadienne et l'Associated Press.

Le couple Dave Ravindra et Rita Bahadur, de Mississauga, en Ontario, a utilisé de nombreux pseudonymes au fil des ans. Les époux ont également multiplié les faillites, été dépouillés de leur permis de courtier immobilier et sanctionnés par les autorités réglementaires ontariennes relativement à une escroquerie de plusieurs millions de dollars.

Donald Trump assurait pourtant à ses étudiants qu'il avait personnellement choisi les meilleurs enseignants afin de leur prodiguer ses secrets pour une réussite financière. Les séminaires sur l'immobilier estampillés « Donald Trump » sont disparus à la suite d'enquêtes des autorités réglementaires aux États-Unis et de plaintes d'anciens étudiants.

La compétence et l'admissibilité de plusieurs instructeurs ont été mises en doute, d'abord aux États-Unis, puis maintenant au Canada. L'Associated Press (AP) a révélé qu'au moins quatre membres du personnel ou enseignants de l'Université Trump avaient déjà été reconnus coupables de crimes. L'un d'eux avait été trafiquant de cocaïne en Floride, alors qu'un autre avait déjà été condamné en cour martiale pour l'agression sexuelle d'une fillette de huit ans.

Par ailleurs, la moitié des 68 anciens membres du personnel qui ont fait l'objet d'une enquête de l'AP avaient un passé peu reluisant en matière financière - faillite, saisie de maison, défaut de paiement sur carte de crédit, etc.

Des documents obtenus par l'Associated Press révèlent aussi que deux individus utilisant des pseudonymes pour Ravindra Dave, 59 ans, et Chandramattie Dave, 55 ans, ont dispensé des séminaires dans des villes canadiennes pour le compte de M. Trump. Le couple guyanais est arrivé au Canada il y a plusieurs décennies et leurs différents pseudonymes apparaissent dans des documents fédéraux et provinciaux.

Le couple a déclaré faillite à au moins quatre reprises depuis 2001 - deux fois chacun. Des documents publics les lient aussi à au moins neuf noms différents, habituellement des permutations de leurs prénom et nom de famille.

Les autorités réglementaires ontariennes ont conclu l'an dernier que le couple avait fraudé de multiples investisseurs canadiens entre 2009 et 2012. Un « Dave Ravindra » ayant la même adresse domiciliaire avait aussi perdu son permis de courtier immobilier deux ans avant d'enseigner pour M. Trump. Le règlement publié par la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario (CVMO) révèle que Ravindra Dave a fondé il y a plus de 10 ans deux sociétés d'investissements qui ne détenaient pas les permis nécessaires, et qu'il avait vendu des valeurs mobilières sans autorisation.

Le couple a organisé en Ontario, en Colombie-Britannique et en Alberta des séminaires au cours desquels il faisait miroiter des rendements de 10 pour cent par année. Au moins 34 investisseurs ontariens ont ainsi perdu pratiquement la totalité des 5,4 millions de dollars dépensés pour acquérir des valeurs mobilières non inscrites.

Selon l'entente conclue en 2015 avec la CVMO, le couple a remis environ 1 million $ à des compagnies qu'il contrôlait et 750 000 $ à des proches. Une somme de 150 000 $ a été utilisée pour régler des comptes de carte de crédit et 90 000 $ pour payer son hypothèque. C'est durant cette période que le couple a commencé son implication auprès de l'Université Trump.

Le couple a écopé de 29 pénalités différentes et a notamment été condamné à verser 3,3 millions aux parties lésées. Des documents fédéraux de faillite font état de dettes de 1,9 million pour l'homme et de 1,3 million pour la femme. Les dossiers de la CVMO révèlent qu'ils doivent encore 3,3 millions de dollars en pénalités et amendes impayées.

Aux États-Unis, le procureur de l'État de New York a soutenu en 2013 que l'Université Trump agissait de manière frauduleuse « dès le début » : faire pression sur les étudiants pour qu'ils souscrivent à de nouveaux séminaires, toujours plus dispendieux. En Californie, d'anciens étudiants ont intenté deux actions collectives - la première doit être entendue le 28 novembre, trois semaines après l'élection présidentielle.

Jill Martin, avocate de l'organisation Trump, n'a pas voulu commenter. Elle a déjà qualifié l'enquête d'AP de tendancieuse.