Même son épouse l'abandonne. La conjointe d'Arthur Porter, l'ex-patron du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), plaidera bientôt coupable aux accusations dont elle est l'objet. Elle reconnaîtra ainsi que les millions du couple étaient les fruits du crime, ce que son mari continue de nier.

Pamela Mattock Porter avait la mine basse lorsqu'elle s'est présentée devant la cour hier, les cheveux noués en une tresse et vêtue d'un chandail de laine rayé.

Elle est restée affalée au fond de son siège pendant que son avocat, Me Marc-Antoine Carrette, expliquait qu'il était parvenu à une entente au sujet d'une réponse à l'accusation avec Me Marie-Hélène Giroux, la procureure qui mène la poursuite pour le Bureau de lutte à la corruption et à la malversation.

Cet aveu de culpabilité sera officiellement enregistré le 18 décembre, ce qui évitera la tenue d'un procès à Mme Mattock Porter, qui est accusée de recyclage des produits de la criminalité et de complot dans la foulée du scandale de corruption du CUSM.

Devant la commission Charbonneau, l'enquêteur de l'Unité permanente anticorruption (UPAC), Jean-Frédérick Gagnon, avait expliqué que la majorité des 11,25 millions de dollars versés en pots-de-vin par SNC-Lavalin à Arthur Porter pour qu'il truque l'appel d'offres du CUSM avait abouti dans le compte d'une société coquille contrôlée par Pamela Mattock Porter aux Bahamas.

«Ultimement, madame Pamela Porter a eu le contrôle de 9,92 millions de dollars découlant des 11,25 millions de monsieur Porter», avait-il déclaré.

Mariée à Arthur Porter depuis plus de 30 ans, Pamela Mattock Porter n'avait jamais vécu à Montréal. Elle menait une vie de multimillionnaire sous le soleil des Bahamas, même lorsque son mari dirigeait le CUSM.

En prison depuis septembre

Mme Mattock Porter avait initialement été remise en liberté dans l'attente de son procès. Mais l'UPAC a découvert que la caution de 250 000$ versée au tribunal au moment de sa libération avait été au moins partiellement tirée des fruits de la criminalité. Elle est donc derrière les barreaux depuis septembre, dans l'attente de son procès.

Juste avant d'être arrêtée pour la seconde fois, elle avait accordé une entrevue à Radio-Canada dans laquelle elle avait abordé son rôle dans le stratagème allégué. «Je transférais de l'argent. Jamais je n'ai eu un doute que c'était illégal», avait-elle dit.

Le 18 décembre, en reconnaissant qu'elle a participé au recyclage des produits de la criminalité, Pamela Mattock Porter reconnaîtra du même coup que les millions de dollars versés à son mari par SNC-Lavalin étaient des produits de la criminalité. Car s'il y a eu recyclage des produits du crime, c'est qu'il y a eu crime.

Arthur Porter, lui, est toujours détenu au Panama, où il conteste la demande d'extradition des autorités canadiennes. De là-bas, il continue de clamer fréquemment son innocence. Il jure n'avoir reçu aucun pot-de-vin et ne pas avoir truqué l'appel d'offre du mégacontrat de 1,3 milliard pour la construction et l'entretien du CUSM.

- Avec la collaboration de Daniel Renaud