L'arrestation en Australie de sympathisants de l'État islamique déterminés à enlever un passant au hasard, de le décapiter et d'en diffuser les images inquiète tous les pays occidentaux, le Canada au premier chef.

«On sait très bien que l'Australie est un pays très similaire au Canada. On ne se met pas la tête dans le sable. Toutes les forces policières du Canada et à l'international sont conscientes que n'importe quoi peut arriver», a indiqué en entrevue à La Presse Canadienne la surintendante Martine Fontaine, responsable des enquêtes de sécurité nationale au Québec pour la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

La police australienne a annoncé jeudi avoir éventé le complot de décapitation ourdi par des partisans du groupe extrémiste de l'État islamique. Neuf des 15 personnes arrêtées lors d'une douzaine de perquisitions menées à Sydney ont rapidement été relâchées.

Selon le professeur Louis Brunet, de l'UQAM, spécialiste des impacts psychologiques du terrorisme, les groupes organisés peuvent désormais, grâce aux nouvelles technologies, poser des gestes à distance par le biais d'une poignée d'individus, voire un seul.

«Nous arrivons à une étape, dans le développement de nos sociétés avec Internet, où l'on risque de retrouver dans divers pays comme le Canada ou l'Australie qui sont normalement calmes et où l'on n'est pas habitué à voir ce genre de violence, des individus qui vont se sentir investis d'idéaux terroristes et qui vont agir», a-t-il indiqué au cours d'un entretien téléphonique.

La surintendante Fontaine précise que cette réalité complique le travail des policiers, qui notent du même coup une montée inquiétante de la nature de la menace potentielle.

«On constate la présence d'une radicalisation menant à la violence et ça entre par Internet dans les familles, dans les foyers et on ne le voit pas», a-t-elle reconnu.

Elle n'est cependant pas étonnée outre mesure de voir que la décapitation au hasard peut être devenue une option.

«Ce n'est pas surprenant que les gens en arrivent à ça, car c'est l'objectif des groupes terroristes que de commettre un acte, peu importe lequel, dans le but justement de créer la terreur et de changer nos habitudes de vie», a-t-elle indiqué.

«Le propre du terrorisme est qu'il modifie complètement notre sentiment de sécurité habituel parce que les terroristes nous disent: attention, nous on vise n'importe qui. On vise même tout particulièrement des innocents», précise le professeur Brunet.

Selon lui, cette approche de violence ultime et aléatoire est beaucoup plus efficace que de s'en prendre à des cibles traditionnelles comme des bases militaires ou des ambassades de pays occidentaux, bien que les terroristes ne se privent pas de cette option non plus.

«La majorité des groupes terroristes ont compris qu'ils avaient un impact encore plus grand sur la société, comme effet de peur et comme effet de levier, s'ils s'attaquent à victimes innocentes. (...) Le terrorisme a un effet psychologique dans la société que d'autres types de violence n'ont pas», a-t-il expliqué.

Devant cette tournure inquiétante, les forces policières n'ont d'autre choix que de s'adapter et d'intensifier le travail de renseignement.

«Nous essayons le plus possible de former les gens en indicateurs pour être en mesure de détecter et de rapporter ce qu'ils voient, ce qu'ils croient suspect», explique la surintendante Fontaine.

«On se doit de suivre les événements et d'ajuster ce que l'on fait, nos enquêtes et tout le reste, au fur et à mesure», a-t-elle ajouté.