Des pharmacies du Mile End ont été frappées par une vague de vols de lait maternisé en poudre. Les établissements croient être la cible de trafiquants de drogue.

Dans trois commerces visités par La Presse, la situation a atteint un point tel que le produit n'est plus sur les tablettes - depuis six mois dans un cas, depuis au moins deux ans pour les deux autres.

Comme au vidéoclub, il faut désormais présenter à la caisse le carton du produit que l'on désire pour obtenir la boîte en question.

Les employés rencontrés dans les trois pharmacies sont unanimes : le lait en poudre sert aux vendeurs de drogue, qui « coupent » ainsi la cocaïne, tout en l'alourdissant. Des représentants des fabricants de lait maternisé soutiennent également cette hypothèse, selon un employé rencontré.

En France, des analyses effectuées par l'Institut national de police scientifique, mises au jour en 2012, ont permis de retrouver du lait en poudre parmi les « additifs » dans la cocaïne saisie par les forces policières.

Lourdes pertes

En observant le prix des produits, on comprend mieux la vigilance des propriétaires de pharmacies. Les boîtes se détaillent généralement autour de 30 $, certaines se vendant même plus de 40 $.

« Un vol, c'est 300 $ d'un coup », souligne sous le couvert de l'anonymat le gérant d'une succursale.

« Ils arrivaient avec deux sacs d'épicerie, empilaient deux rangées de trois boîtes dans chaque sac et repartaient, raconte un commis. Quand ils nous voyaient, ils laissaient les sacs dans l'allée et se sauvaient. »

Tantôt camouflés par une casquette et des lunettes fumées, tantôt en veston cravate, les malfaiteurs ne suivaient pas de tendance précise.

Uniquement dans le Mile End

Le plus curieux dans cette histoire, c'est que le problème semble frapper uniquement dans l'axe de l'avenue du Parc, dans le Mile End. Trois commerces de deux chaînes différentes y ont retiré le lait maternisé des tablettes.

La Presse a visité une pharmacie du Plateau Mont-Royal, deux de la rue Sainte-Catherine au centre-ville, en plus de téléphoner à une pharmacie dans le quartier Centre-Sud et une autre dans Rosemont-La Petite-Patrie. Partout, le nécessaire pour nourrir le dernier-né est à portée de main, comme n'importe quel autre produit en vente libre.

« C'est un problème spécifique à certains quartiers », reconnaît Hélène Bisson, vice-présidente communications au Groupe Jean Coutu.

Au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), on soutient ne pas avoir eu vent d'un tel fléau dans les postes de quartier, mais les vols à l'étalage ne sont pas forcément tous signalés aux autorités policières.