S'il est surtout vu comme un homme tranquille et discret par ceux qui l'ont côtoyé, Chiheb Esseghaier a aussi un côté impulsif et colérique qui a fait des remous dernièrement.

En mai 2012, alors qu'il était déjà surveillé par la GRC, l'homme aurait eu un comportement « bizarre » sur un vol d'Air Canada qui l'amenait vers une conférence scientifique avec des collègues au chic hôtel Iberostar de Cancún, selon le réseau CBC. Il aurait alors eu une altercation avec une agente de bord.

Jointe en soirée par La Presse, une porte-parole d'Air Canada a refusé de confirmer cette information ou de dire si la sécurité des passagers avait été compromise par les agissements allégués de M Esseghaier.

Quelques mois plus tôt, le suspect avait arraché une affiche de la campagne de Centraide où les modèles posaient nus et qui était collée dans les couloirs des bureaux de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS) à Varennes, où il étudiait.

« Ça l'avait un peu dérangé, raconte la directrice des communications, Julie Martineau. Nous l'avons rencontré pour lui dire qu'ici on ne fonctionne pas comme ça », dit-elle, indiquant qu'il n'a pas eu de note au dossier de l'étudiant suite à cet évènement.

À l'INRS, l'arrestation de Chiheb Esseghaier était sur toutes les lèvres, mardi. Chez les professeurs comme chez les employés, c'était l' incrédulité totale.

Raja Chinnappan a travaillé durant plusieurs mois en 2011 avec l'homme accusé de complot terroriste dans le laboratoire de biotechnologie de l'établissement. « Il travaillait bien et avait l'air motivé par ses recherches, raconte-t-il. Il n'a jamais fait de problème. » Esseghaier étudiait à l'époque les biosenseurs.

Selon M. Chinnappan, qui passait toute la semaine en compagnie du suspect, ce dernier n'abordait jamais le sujet de la religion devant ses collègues. « Je n'étais pas très proche de lui, mais nous avions un groupe soudé. Je suis extrêmement surpris. »

Sébastien Garbarino, assistant de recherche à l'INRS ajoute : « Il était souvent dans son laboratoire. Il ne se mêlait pas souvent avec les autres étudiants ».

Le président du syndicat des professeurs, Jean-Charles Grégoire a pour sa part décrit le choc des membres du personnel. « On ne pouvait pas se douter d'une telle histoire dans notre institut », dit-il.

« C'est étonnant. On n'arrive pas vraiment à comprendre », ajoute le professeur Jean-Pierre Matte. Pour apaiser les inquiétudes, l'INRS a tenu une rencontre d'urgence avec l'ensemble des professeurs mardi matin.

À la mosquée Taiba rue Van Horn à Montréal, où, selon nos informations, le suspect se rendait parfois prier, son passage est passé inaperçu. « Je n'ai jamais entendu son nom et je ne le reconnais pas sur les photos. Il est peut-être déjà venu, mais je ne l'ai jamais remarqué. Ici, personne ne se souvient de lui. Les gens viennent prier, puis repartent  », raconte Mustafa Abu Shabban, vice-président du conseil d'administration.

« Il n'y a pas d'Imam ici et nous ne sommes pas ouverts en dehors des heures de prière. Alors on ne connaît pas tout le monde. »

Selon le directeur général de la Mission universitaire de Tunisie en Amérique du Nord, Lotsi Hassine, contrairement à la majorité des étudiants tunisiens, M Esseghaier n'a pas bénéficié d'une bourse de son pays d'origine pour étudier au Canada.