Josue Jean n'en peut plus de passer ses journées depuis trois ans à travailler et à jouer à la PlayStation en attente de son procès pour traite des personnes et proxénétisme. « Je ne fais plus rien ! Je ne sors plus. Je travaille et je rentre à la maison », s'est-il plaint mercredi en demandant l'arrêt du processus judiciaire en vertu de l'arrêt Jordan.

Arrêté en décembre 2014 à Montréal, l'homme de 40 ans est accusé d'avoir violenté, séquestré et sexuellement agressé deux femmes et de les avoir forcées à se prostituer, entre 2002 et 2009. Il fait face à 18 chefs d'accusation, dont six de proxénétisme et deux de traite des personnes, dont la peine minimale est de quatre ans. Des accusations « extrêmement graves », selon la Couronne.

Son procès devant jury, qui devrait durer un mois en septembre prochain, se déroulera presque quatre ans après son arrestation. Selon son avocate, Me Isabelle Larouche, ce délai excède le plafond de 30 mois fixé par la Cour suprême dans l'arrêt Jordan alors que l'affaire n'est pas « complexe ». En conséquence, elle a demandé mercredi à la juge Hélène Di Salvo d'ordonner l'arrêt du processus judiciaire pour délais déraisonnables.

Mercredi, Josue Jean a témoigné pour relater l'ampleur du préjudice que ses trois années d'attente lui avaient fait subir. Découragé, parfois agacé, il a décrit les frustrations de son quotidien, devenu ennuyeux en raison de ses conditions de libération. « Je suis stressé, ça dure depuis quatre ans, je ne peux rien faire, c'est des maux de tête. Il n'y a rien de vrai ! », a-t-il insisté.

DEUX EMPLOIS

Néanmoins, convient-il, les actions judiciaires ne l'ont pas empêché de conserver son emploi à temps partiel dans un entrepôt et de travailler à temps plein dans la vente de voitures. « J'allais prendre des verres avec des collègues. Ça fait quatre ans que je ne peux pas y aller », a-t-il d'abord déploré, ajoutant toutefois plus tard qu'éviter les bars ne l'importunait pas.

Josue Jean a aussi martelé qu'il n'y avait « rien de vrai » dans cette affaire. Ainsi, ces « fausses accusations » l'ont brouillé avec sa famille. Il n'assiste plus aux réunions familiales. Une ordonnance de non-publication nous empêche de rapporter certains pans de son témoignage.

Le préjudice subi par l'accusé est « minime », soutient de son côté le procureur de la Couronne Bruno Ménard. De plus, les délais de 46 mois sont « raisonnables » en raison des délais institutionnels en vigueur à Montréal avant l'arrêt Jordan. Ainsi, fait-il valoir, les parties ont dû patienter près de deux ans pour tenir l'enquête préliminaire de deux jours, même s'ils avaient choisi la première date disponible. La cause est également d'une « complexité moyenne », ajoute-t-il.