Le FBI a espionné de jeunes Québécois dans le cadre d'une enquête de terrorisme internationale, révèlent des documents judiciaires obtenus par La Presse.

Le Bureau fédéral d'enquête des États-Unis a notamment intercepté des conversations électroniques échangées sur internet par de jeunes suspects, dont Wassim Boughadou, ce Montréalais arrêté récemment en Turquie en raison de ses liens présumés avec le groupe armé État islamique, et sa conjointe, Neima Hammouya, elle aussi de Montréal.

La teneur des conversations est tenue secrète par le tribunal. On apprend toutefois que le FBI les a communiquées à l'Équipe intégrée de la sécurité nationale de la GRC. Cette dernière les a utilisées dans le cadre de son enquête sur six jeunes Québécois partis vers la Syrie en 2012 et qui sont soupçonnés d'avoir joué un rôle dans la prise d'otages de deux journalistes américains.

Matthew Schrier et Theo Padnos ont été détenus contre leur gré et torturés en Syrie à partir de décembre 2012, l'un durant sept mois, l'autre deux ans. Après sa libération, Padnos, originaire du Vermont, a affirmé à des médias américains qu'il avait reconnu l'accent québécois en écoutant parler les preneurs d'otages. En 2015, des enquêteurs de la GRC ont mené des perquisitions au domicile des six Québécois. Quatre seraient de retour au Québec. Les deux autres, Wassim Boughadou, 25 ans, originaire du quartier Côte-des-Neiges, et un jeune Lavallois sont toujours à l'étranger.

LA TRACE DE L'ARGENT

Grâce aux conversations captées, le FBI a notamment mis la GRC sur la piste de plusieurs transferts d'argent vers l'étranger. La police américaine a intercepté des courriels de Boughadou alors qu'il se trouvait hors du Canada et dans lesquels il demandait à sa femme de « ramener le maximum d'argent possible ». Cette dernière lui aurait alors fourni ses coordonnées bancaires, lit-on dans une demande de mandat de perquisition rédigée en 2015 par un agent de l'EISN, mais qui vient tout juste d'être rendue partiellement publique.

Dans le document, la GRC cite à maintes reprises des informations fournies par le FBI comme faisant partie intégrante de son enquête.

Les documents judiciaires, largement caviardés, ne précisent pas si les Américains continuent de surveiller les jeunes Québécois. Les conversations qu'ils ont remises aux autorités canadiennes remontent à quelques années.

FBI ET GRC, BIS

Ce n'est pas la première fois que le Bureau fédéral d'enquête a dans sa mire de jeunes aspirants djihadistes québécois. Il y a quelques années, le corps policier est tombé sur des conversations sur un réseau social entre Martin Couture-Rouleau, auteur de l'attentat de Saint-Jean-sur-Richelieu, et l'adolescent de 15 ans qui a été reconnu coupable en décembre 2015 d'avoir tenté de quitter le pays dans le but de commettre un acte terroriste à l'étranger.

Le FBI avait obtenu les échanges en fouillant des serveurs informatiques dans le cadre de l'une de ses propres opérations. L'information touchant les Québécois avait été transmise à la GRC.

PHOTO FOURNIE PAR Wassim Boughadou

Wassim Boughadou

PHOTO tirée de sa page Facebook

Martin Couture-Rouleau, auteur de l'attentat de Saint-Jean-sur-Richelieu